Il lui avait cassé la mâchoire : un jeune Rouxmesnilais en prison
Parce qu’il s’est senti insulté par les gestes qu’un jeune homme lançait à la foule ce 7 juillet 2016, Robin Leberquier l’a frappé, lui cassant la mâchoire.
La soirée était festive ce 7 juillet 2016, elle s’est mal terminée pour Robin Leberquier et surtout pour le jeune homme qu’il a frappé suffisamment fort pour lui briser la mâchoire. A la barre du tribunal, vendredi 19 mai, le Rouxmesnilais de 22 ans a écopé d’un an de prison : il est ressorti menottes aux poignets pour prendre la direction de la maison d’arrêt.
Le prévenu ne connaissait pourtant pas sa victime : dans la soirée du 7 au 8 juillet 2016, tous deux voulaient juste s’amuser profitant de la retransmission en direct du match France-Allemagne joué dans le cadre de l’Euro de football.
Dans deux groupes d’amis différents, les deux jeunes gens voient leur chemin se croiser près du pont Ango : Robin Leberquier est en voiture avec sa petite amie, sa belle-mère et des amis et le jeune de 17 ans est à pied. Il fête la victoire de la France à grand renfort d’insultes et de doigts d’honneur pour l’équipe allemande.
Dans son audition, la victime raconte avoir vu Robin Leberquier « descendre de voiture et courir vers moi. Deux fois, il a essayé de me frapper et deux fois, il est tombé. Puis sa copine l’a appelé et il est remonté en voiture » . Vingt minutes plus tard, le chemin des deux jeunes se croisent à nouveau : « Cette fois, c’est sa belle- mère qui est descendue de voiture pour me demander de partir. Elle avait peur que ça se termine mal. Je ne comprenais pas : je ne lui avais rien fait… » . Il ne l’a pas vu venir mais Robin Leberquier est déjà près de lui. Il lui assène un coup en pleine figure qui l’envoie directement au sol. Il se relève rapidement mais il a la bouche en sang.
Pendant que Robin Leberquier repart, l’ami de la jeune victime appelle sa mère qui l’emmène rapidement aux urgences : il souffre d’une fracture mandibulaire et de douleurs dentaires. Il a subi deux interventions chirurgicales, est resté huit jours à l’hôpital et attend une possible 3e opération. « Il aura des séquelles pour longtemps » assure sa maman, présente à l’audience.
Dans le témoignage de l’ami de la victime, le président du tribunal relève une insulte homophobe : « Parce qu’il avait les cheveux longs, vous lui auriez lancé : espèce de sale PD » . Il s’inquiéte de la gravité de cette agression commise avec préméditation « parce qu’elle a eu lieu lors de votre 2e rencontre ce soir-là » et beaucoup de sang-froid « malgré la présence de votre petite-amie, de sa mère et alors que vous ne connaissiez pas la victime » .
Au juge qui lui demande les raisons de cette agression, Robin Leberquier assure que la victime « a fait des doigts d’honneur dans ma direction. Et quand il est revenu la deuxième fois, il était avec deux copains, il a été agressif avec ma bellemère et j’ai eu peur pour ma petite-amie » .
L’avocate de la victime assure que « ces violences sont extrémement désagréables dans un contexte festif alors que les jeunes expriment leur joie d’avoir gagné » . Elle s’interroge sur le fait que Robin Leberquier ait pu prendre pour lui des insultes qui concernaient l’équipe perdante sur le terrain et assène qu’il ne cherche qu’à « se dédouaner en parlant aujourd’hui à la barre de sa peur pour les gens qui l’accompagnaient » . L’avocate revient sur les douleurs et les problèmes dentaires de son jeune client : « Il a encore des plaques dans la mâchoire qui le font beaucoup souffrir » . Elle demande une expertise parce que la situation médicale n’est pas encore stabilisée pour son client.
Le procureur de la République revient, lui aussi, sur les blessures précisant : « L’interruption temporaire de travail est de 30 jours avec cette particularité qu’elle n’a pas été faite par un médecin traitant mais par un médecin légiste » . Même si l’insulte n’a pas été retenue comme une circonstance agravante, il souligne le caractère homophobe qui « colore ce dossier : les mots sont cruels et la problématique de l’homophobie n’est pas réglée. Il y a encore beaucoup à faire dans la société » . En rappelant la gravité de cette agression « gratuite dans le cadre d’une manifestation sportive et festive » et des blessures pour la victime. Malgré un casier judiciaire vierge, il réclame 8 mois de prison ferme.
L’avocate de Robin Leberquier assure que les faits ne sont pas contestés mais « écarte tout ca- ractère homophobe : Sale PD est malheureusement une expression qui est entrée dans le langage courant des jeunes » . Elle assure que le jeune homme victime du coup « n’est pas tout blanc : les insultes et les doigts d’honneur ont été vus comme une provocation » . Elle explique : « L’énervement du moment, la vexation des deux chutes lorsqu’il est sorti de voiture la première fois… tout a dégénéré » .
Des séquelles importantes pour la victime Coloration homophobe Une insulte entrée dans le langage des jeunes Un jeune au parcours professionnel exemplaire
L’avocate reconnait que son client doit être sanctionné mais « certainement pas d’une peine d’emprisonnement ferme » . Elle rappelle que son casier est vierge et que son client a un parcours professionnel exemplaire : à 22 ans, il a décroché plusieurs CAP, travaille dans une petite entreprise et fait régulièrement des démonstrations pour présenter son métier.
Le président du tribunal ne l’entend pas de cette oreille : il condamne le prévenu à un an de prison ferme avec un mandat d’arrêt parce que Robin Leberquier n’est plus là lorsqu’il prononce la peine.
Pourtant, le temps de passer au dossier suivant, le jeune homme réapparait à la barre : en attendant, il était dehors, devant le tribunal. Lorsque le président lui indique sa peine, il a le regard fixe. Il le gardera jusqu’à ce que l’escorte policière lui passe les menottes pour partir directement à la maison d’arrêt de Rouen.