Les Informations Dieppoises

Des femmes à l’assaut de Venise

Depuis un an, le club d’aviron de Dieppe a créé une section pour les personnes atteintes d’un cancer ou en rémission. Dimanche 4 juin, 28 femmes vont se poster à la ligne de départ d’une course mythique à Venise, la Vogalonga, pour un défi sportif et huma

- Camille Larher

Le temps des derniers préparatif­s. Des dernières vérificati­ons. De l’énervement qui monte crescendo. « Mais tu as pris du linge pour un mois, on part seulement quelques jours » , lance Bénédicte Ouvry, au four et au moulin. La présidente du club d’aviron se demande encore à qui est ce sac rose qui traîne à l’entrée. « Mais vous êtes pires que des gosses ! » , sourit-elle en préparant le départ de 28 femmes de la région dieppoise pour Venise. Le 4 juin, elles prendront le départ de la Vogalonga, une course mythique à Venise.

Bénedicte Ouvry a déjà réfléchi à l’itinéraire. Il faudra bien passer les Alpes. Le bateau installé sur une remorque n’attend plus que le grand départ. Mercredi soir, un premier convoi a quitté Dieppe. Les autres suivront plus tard ou prendront l’avion.

Ce qui attend ces femmes à Venise est exceptionn­el. Exceptionn­el pour celles qui se sont entraînées d’arrache- pied, deux à trois fois par semaine. Elles y ont mis tout leur coeur. Cette course est un défi sportif mais avant tout humain. Elles prennent les rames comme des épées, prêtent à se battre contre ce qui les affaiblit. Depuis un an maintenant, Bénédicte Ouvry a créé une section spécifique pour les personnes touchées par un cancer ou en rémission. « La demande nous avait été faite par un groupe qui suit des cours de gymnastiqu­e postcancer » , souligne-t-elle.

Numéro 680

Le groupe était constitué de neuf femmes puis il n’a cessé de s’étendre. Aujourd’hui, elles sont 28 à vivre cette aventure humaine. Elles n’ont pas pris l’eau tout de suite. Il a fallu des mois de recherche pour trouver des bateaux adaptés. « Ils n’étaient pas assez stables pour leur pratique, explique Bénédicte Ouvry. Il faut avoir de l’équilibre et elles auraient pu tomber à l’eau » . Le 6 mai dernier, une baleinière pouvant accueillir huit rameurs et une yole de Bantry (embarcatio­n en bois) de plus de 20 places ont été baptisées. Fini l’ergomètre, un simulateur au sol, et bonjour la glisse.

« Il a fallu les rééquiper avec des rames spéciales car les autres étaient trop lourdes, poursuit la présidente du club. Il a fallu réfléchir, ça a mis un certain temps… » . Alors pour fêter l’événement et créer une réelle émulation, Bénédicte Ouvry n’a pas longtemps hésité. Elles partiront à l’assaut de Venise et de sa célèbre Vogalonga sous le n° 680. Cette course est connue de tous les rameurs. Plus de mille embarcatio­ns y participen­t pour un parcours de 32 kilomètres à travers les canaux de la « belle italienne ». Le 4 juin, à Venise, le temps s’arrête pour laisser place aux seuls bateaux à rames durant trois heures.

À leur rythme

Attablées à l’heure de midi, Brigitte, Sylvie et Séverine pensent aux derniers préparatif­s. « Je ne me sens pas vraiment stressée, confie la première, mais je sens une certaine appréhensi­on » . Même durant les entraîneme­nts, les rameuses n’ont pas atteint les 32 km. « Mais peu importe, note Sylvie. Nous irons à notre rythme. L’ambiance sera sympa, nous n’avons pas de délai d’arrivée » . La Dieppoise sent déjà les bénéfices de l’aviron sur son corps : développem­ent de la cage thoracique et une meilleure capacité respiratoi­re pour cette femme qui a souffert des poumons.

Si l’aviron leur fait physiqueme­nt du bien, moralement, cette pratique sportive leur permet aussi de retrouver une vie sociale. Chacune se connaît, vient en aide à l’autre, prend soin de l’équipière. « On rigole beaucoup entre- nous, remarque Séverine. C’est aussi cela qui permet de faire avancer le bateau » .

Newspapers in French

Newspapers from France