Des chèvres au pied des immeubles
Le bailleur social Sodineuf va développer l’écopâturage dès ce début d’année à Dieppe et dans plusieurs communes de la région. Des chèvres vont entretenir ses espaces verts.
Ouvrir les fenêtres de son appartement et pouvoir regarder des moutons d’Ouessant ou une chèvre des fossés en train de paître entre les immeubles. C’est ce que pourront faire à partir d’avril de très nombreux locataires de Sodineuf Habitat normand.
Le bailleur social du territoire dieppois a décidé de se lancer dans l’écopatûrage et ne fait pas dans la demi-mesure : il a choisi pour cette première expérience de clôturer un total de cinq hectares de parcelles d’espaces verts situées dans ses résidences et au pied des immeubles qu’il gère à Dieppe, mais également dans la région dieppoise (voir encadré).
Pour faire baisser les charges
Tout a débuté par une rencontre entre Henry Gagnaire, le directeur de Sodineuf Habitat normand, et Damien Hédin, le président de l’association Ökotop et éleveur, qui propose, notamment, la gestion écologique des espaces verts. Ce dernier a exposé le travail réalisé par ses 200 ovins et caprins sur une dizaine d’hectares de terrain sur toute la Seine-Maritime. Travail qui a retenu l’attention d’Henry Gagnaire.
Lorsque Sodineuf s’est lancé une réflexion sur la gestion de toutes ces pelouses, haies, arbustes… de son patrimoine, il a pensé à cette solution pour faire baisser les charges. « En effet, la loi égalité citoyenneté de l’été 2016 pousse les bailleurs à individualiser les charges. Or, certaines résidences ont beaucoup d’espaces verts. Le coût de l’entretien était jusqu’alors mutualisé. Désor- mais, ce n’est plus possible. Il fallait donc trouver une solution pour maintenir les charges » , explique Benoît Martinet, le responsable de l’amélioration du patrimoine chez Sodineuf. Par exemple à SaintDenis-d’Aclon, elles auraient pu passer de 10 à 25 € par mois.
Ecopâturage à grande échelle !
Est née alors l’idée d’écopatûrage à grande échelle ! Car ce ne sont pas moins de cinq hectares d’espaces verts qui ont été identifiés comme pouvant être entretenus par des animaux. Sodineuf s’est donc tourné vers Ökotop pour le mettre en place.
Benoît Martinet et Damien Hédin ont sélectionné les sites qui seraient les plus adaptés pour accueillir les ovins. « Tout en étant attentif aux enjeux de cohabitation entre les animaux et l’homme, et l’appropriation et l’usage qu’ont les habitants des espaces verts de leur quartier » , souligne le premier.
Une fois les sites validés, des rencontres ont eu lieu avec les locataires pour leur expliquer les grands principes de cette initiative. Les quelques personnes présentes devaient se faire le relais auprès de leurs voisins. « Le projet a été bien accueilli. Il y a eu quelques questions et quelques remaniements » , explique Damien Hédin.
Prochaine étape : la pose de 5 km de clôtures ! Soit un investissement pour Sodineuf de 50 000 €. Elles devraient être installées entre janvier et mars pour une arrivée des animaux en avril.
Un numéro d’urgence en cas de fugue
« En mars, les habitants recevront une information plus poussée via des flyers, des panneaux seront installés avec le numéro d’urgence à contacter » , explique Damien Hédin. En effet, Ökotop assure une permanence 24 heures sur 24 avec une astreinte, ce qui permet de les contacter en cas de fugue d’un animal (ce qui est très rare), mais aussi si une personne se rend compte qu’un animal est malade ou blessé.
Si l’écopâturage a été choisi pour des raisons économiques, il a également d’autres objectifs. Écologiques, tout d’abord, avec la fin programmé en 2020 de l’autorisation d’utiliser des produits phytosanitaires pour les bailleurs sociaux. « Et la présence animale sur plusieurs années fait qu’on ramène une biodiversité domestique qui amène ensuite une biodiversité sauvage sur ces sites. Les pelouses deviennent prairies et une microfaune indispensable à la biodiversité s’y ins- talle » , explique l’éleveur.
Sans oublier l’aspect social et créateur de liens qui ne sont pas négligeables. Damien Hédin a une foule d’anecdotes sur les rencontres et les échanges qui ont pu se faire autour de ces animaux. Les petits comme les grands aiment aller discuter autour des enclos.
À la résidence Lemeunier, par exemple, à Dieppe, les enfants de la crèche y côtoient les personnes âgées. « Ces dernières reprennent goût à la promenade. On fait du bien aux gens » , explique-t-il.
Il faudra maintenant que les habitants soient un peu patients. Mais dès ce printemps, les pieds d’immeubles auront des airs de campagne.