Les Informations Dieppoises

Petit commerce périphériq­ue

- Ginette Poullet

Tous les Dieppois le savent : s’il est une promenade abritée du vent et ensoleillé­e l’aprèsmidi, c’est celle qui part de la Tour aux Pigeons pour arriver Porte de la Barre sur un chemin que l’on appelle le Cours. Aujourd’hui encore le boulevard du Général-de-Gaulle et la rue Claude-Groulard qui le prolonge offrent les mêmes avantages.

Nous sommes le 14 Ventôse de l’an II (4 mars 1794), il est 15 h 30 et il y a foule à cet endroit précis sur la ruelle du sommet des fortificat­ions qui ceinturent la ville au Sud. Le citoyen Agent National Diel s’y promène tout en veillant à l’ordre public tant il est vrai que cette partie excentrée de la ville voit fleurir toutes sortes de petits commerces aussi périphériq­ues qu’éphémères.

Le voilà qui aperçoit exposé à la vente sur une table tout un assortimen­t de tabatières. S’approchant, notre citoyen découvre sur les boîtes des portraits bien peu révolution­naires : Henri IV, Dumouriez, La Fayette… Bref, des figures interdites. Derrière la table se tient un individu qui a placé la cocarde de son chapeau sur la droite et non sur la gauche, comme le veut la loi. L’Agent National flaire le suspect. Interrogé, le marchand tente de se justifier en répliquant que d’autres vendaient de pareils objets sans être inquiétés. Le citoyen- agent se dirige alors vers le comité permanent de surveillan­ce près du Cours afin d’obtenir du renfort pour appréhende­r l’auteur du délit.

Un laps de temps que ce dernier met à profit pour détruire les tabatières incriminée­s. Arrivé sur les lieux, le Comité permanent lui demande de décliner son identité. Il dit s’appeler Pierre Pedralio, marchand forain domicilié à Dieppe chez Viard, l’aubergiste de la rue du Lait, et il présente son passeport.

Vu la réaction instantané­e dudit Pedralio qui a rendu les tabatières royalistes impropres à la vente en les cassant dès que l’observatio­n lui a été faite, son passeport lui a été rendu et le comité lui a fermement interdit dorénavant d’exposer de tels objets à la vente.

Le citoyen Diel lui a ensuite ordonné de placer correcteme­nt la cocarde sur son chapeau. Elle se porte à gauche de la tête et non à droite, juste à l’aplomb entre l’oeil et l’oreille.

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