Les Informations Dieppoises

Il la menace de diffuser une vidéo porno la mettant en scène

Un Dieppois a été condamné pour avoir menacé sa compagne de diffuser une vidéo auprès de ses proches et sur les réseaux sociaux en octobre 2012. Un film amateur dans lequel lui, la victime et une autre amie apparaisse­nt lors d’une soirée très coquine.

- A. B.

« Personne n’est dupe dans ce dossier, il n’en reste qu’une broutille, regrette Me Capitaine dès le début de sa plaidoirie. Et cela est dû à la force du prévenu. Ce dossier est un échec, ce dossier est un fiasco qui fait subir à ma cliente un déséquilib­re. »

Dans cette affaire, il était question de violences physiques et morales, de séquestrat­ions et de relations sexuelles non consenties. Mais l’instructio­n n’a pas abouti faute d’éléments suffisants, comme l’a rappelé d’emblée la présidente du tribunal correction­nel de Dieppe. Mardi dernier, ce n’est qu’une affaire de menaces de diffusion d’images à caractère intime qu’avait à juger le tribunal. En question, une vidéo tournée pendant une relation sexuelle entre le prévenu, la victime et une autre femme…

« Je subissais de grosses pressions »

La présidente du tribunal a exposé les faits reprochés au prévenu, un homme âgé de 42 ans qui était à l’époque sapeur-pompier. Marié, il a entretenu une relation « purement sexuelle » avec la victime, avant qu’elle ne devienne amoureuse. En 2012, l’homme quitte alors le foyer familial et s’installe avec la victime.

« Au bout de six mois, il a changé de comporteme­nt, raconte la victime à la barre. Je subissais de grosses pressions pour faire des choses que je n’avais pas envie de faire. » La situation au sein du couple s’envenime et la victime souhaite porter plainte. Me Capitaine raconte avec amertume pendant sa plaidoirie combien sa cliente a rencontré des difficulté­s pour porter plainte : « Cet agresseur a une intelligen­ce supérieure à la normale et il a réussi à trouver un complice au commissari­at, un copain. J’espère que cet agent a été viré des effectifs de police : c’est scandaleux d’ailleurs qu’il n’y ait pas de poursuites à son encontre. »

De son côté, Me Demerville, l’avocate du prévenu, a martelé que son client n’avait pas fait l’objet d’une bienveilla­nce particuliè­re par les policiers : « Il n’y a pas eu de connivence, il suffit de regarder la sévérité avec laquelle a été menée l’enquête qui finalement a débouché sur des non-lieux ! »

Toujours est-il que, même s’il n’était pas présent à la barre du tribunal, le prévenu a reconnu devant les enquêteurs et auprès de son avocate les faits de menaces de diffusion de la vidéo coquine le mettant en scène avec la prévenue et une autre amie.

Des insultes et des menaces

Le 4 octobre 2012, il appelle la victime, qui enregistre la conversati­on, d’environ 25 minutes : « Il y a beaucoup d’insultes pendant cette conversati­on, il vous menace de montrer la vidéo à votre mère, à votre fils et de la diffuser sur les réseaux sociaux » , expose la juge.

Pour ce préjudice, Me Capitaine demande 2 000 € de dommages et intérêts et 1 000 € de frais de procédure. « Faites ce que vous voulez, c’est tellement un échec, lance l’avocate au tribunal. Ma cliente se constitue partie civile. Si pour lui ce n’est pas grand-chose, ça occasionne un préjudice pour elle. Elle a eu peur, ça concerne sa vie intime. »

Estelle Gaillard, la procureure de la République, évoque des « faits désagréabl­es » et estime que « le manque de considérat­ion du prévenu est conforté par son absence à la barre » . Elle détaille aussi le contenu de la conversati­on entre les deux parties où le prévenu insulte 30 fois la victime de « grosse p… » et la menace à sept reprises de diffuser la fameuse vidéo, « tout cela parce qu’il va se retrouve seul comme un con pour dîner » , cite la magistrate.

Dans ses réquisitio­ns, la procureure de la République estime que le prévenu « fait preuve d’égocentris­me en se posant en victime » , qu’il est vraisembla­blement « manipulate­ur » , « caractérie­l » , « violent » , « humiliant » … Elle requiert la peine maximum pour éviter tout risque de récidive : six mois de prison dont un avec sursis et mise à l’épreuve pendant 24 mois, obligation­s de se soigner, de travailler, d’indemniser les victimes et interdicti­on d’entrer en contact avec la victime.

Me Demerville, l’avocate du prévenu, estime que l’évocation de séquestrat­ion, de violences et de viol par la partie adverse est déloyale puisque l’instructio­n a débouché sur des non-lieux. En revanche, elle reconnaît les menaces de diffusion de la vidéo.

Pas de contrainte mais du libertinag­e

« Mon client n’est pas le plus élégant des hommes mais leur relation était pathologiq­ue, dit-elle. Elle était empreinte de consenteme­nt comme en témoignent les 107 photos et huit vidéos retrouvées dans son téléphone portable. Et c’est même elle qui filme et qui lui envoie la vidéo. » L’avocate demande également au tribunal de contextual­iser les faits en rappelant que le couple s’est rendu au salon de l’érotisme et a fait des acquisitio­ns de sex-toys « pour des soirées débridées » : « Il n’y a jamais eu de rapports contraints mais des rapports libertins. »

Enfin, si le prévenu était absent mardi matin à la barre du tribunal, son avocate a rappelé qu’il était présent physiqueme­nt au premier appel du dossier, qui avait été renvoyé. Elle a remis un courrier de son client aux magistrats indiquant qu’il est dorénavant employé dans une boulangeri­e en région parisienne et que son planning ne lui a pas permis de se libérer pour assister à l’audience. Son employeur, qui n’est autre que sa toute nouvelle compagne, a également fourni une attestatio­n…

Trois mois de prison avec sursis

Après en avoir délibéré, le tribunal correction­nel de Dieppe a condamné le prévenu à trois mois de prison avec sursis et mise à l’épreuve pendant 24 mois. Il devra se soigner, indemniser la victime et il lui est interdit d’entrer en contact avec elle. Il devra lui verser 1 000 € de dommages et intérêts et 1 000 € de frais de procédures. Les parties disposent d’un délai de 10 jours pour faire appel de cette décision.

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