Les Inrockuptibles

Rihanna, égérie Dior

Première icône noire de la maison, oui. Mais ce n’est pas la seule chose que la chanteuse apporte à la marque.

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Rihanna est connue pour beaucoup de choses. Par ordre d’importance, sa versatilit­é capillaire, son amour de la weed consommée en public et sa provoc 3.0. Moins pour son habilité à faire vendre de la haute couture. Et c’est peut-être précisémen­t pour ça qu’elle est aujourd’hui la nouvelle égérie de la maison Dior : car s’il y a bien un endroit où on ne s’attendait pas à la croiser, c’est bien là. Non pas au premier rang du show, fidèle à ses mondanités fashion, mais à l’affiche de la prochaine campagne de la maison française, tournée au château de Versailles.

Ces images ont fait frétiller la toile : jolie comme un coeur, presque assagie, son visage est ombragé par une voilette et son corps enveloppé d’un corset rétro. Avec son allure mi-princesse, mi-demi-mondaine, la chanteuse de la Barbade part à la conquête d’un palais où elle s’impose dès lors comme la nouvelle monarque. Elle sait ce qu’elle fait – elle a déjà rhabillé la marque Balmain en devenant leur égérie en 2013. Là, vêtue d’une tenue cintrée en denim couture, la musicienne sexy remettait à la mode une féminité façon amazone urbaine. Aujourd’hui, en tant que premier visage noir de Dior, elle marque un tournant historique pour la maison.

Succédant à l’actrice Jennifer Lawrence, blonde aux yeux bleus élevée au gros grain et au parcours sans faute, elle se positionne en opposition stylistiqu­e et symbolique totale. Si Lawrence incarnait un classicism­e de tapis rouge et optait pour un chic new look fifties, Rihanna, elle, se fait plus sexy, plus moderne : sa tenue est ponctuée d’un boléro en fourrure, d’un poitrail tatoué et de grands gants de cuir. Pour elle, le créateur Raf Simons semble délaisser son style austère et citer l’illustre prédécesse­ur de la maison, John Galliano, connu pour ses coupes over the top et ultrafémin­ines. Il en profite pour reposition­ner la marque.

Car Rihanna est plus qu’une personne, elle est un signifiant, une valeur indicative

de la direction que veut prendre la maison qui l’embauche. Là, chez Dior, elle prédit une volonté de rajeunisse­ment et de démocratis­ation (de leur image à défaut de leurs prix). Ses déboires savamment mis en scène, son style musical hybride et ses looks qui semblent destinés à n’exister que sur le net ont transformé Rihanna en valeur monétaire lisible internatio­nalement. Comme le clame son dernier hit : Bitch Better Have My Money. Alice Pfeiffer

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