Interruption volontaire de Planning familial
Marion Maréchal-Le Pen a annoncé qu’en cas de victoire, elle ne subventionnerait plus les associations “politisées et idéologiques”. Sa cible principale : le Planning familial.
La première fois, ça a failli faire pschitt. En meeting à Marseille, Marion MaréchalLe Pen promet, si elle remporte les régionales en Paca, de ne plus verser “un sou” au Planning familial. Mais ce jour-là, le 13 novembre, l’actualité sanglante des attentats ruine son effet d’annonce. La candidate se répète donc deux semaines plus tard lors du dernier débat télévisé qui l’oppose à ses concurrents, et cette fois elle développe : elle accuse le Planning d’être “une association politisée et idéologique” qui fait la promotion “du mariage homosexuel, de la PMA pour les femmes homosexuelles, de la théorie du genre qu’elle enseigne dans les écoles et d’une libéralisation de plus en plus poussée de l’avortement”. L’enjeu du débat échappe à certains électeurs. Pour la plupart des femmes pourtant, c’est assez clair.
des soins rapides et gratuits
“C’est ignoble. Quand j’ai appris ça, j’ai halluciné”, s’énerve Marie, dans la salle d’attente du Planning familial de Marseille. Cette comptable de 33 ans est venue pour s’assurer qu’elle n’est plus enceinte. Elle croit avoir fait une fausse couche mais n’en est pas sûre. Elle a déjà des jumeaux de 2 ans et ne se voit pas assumer l’éducation d’un troisième enfant. “Les consultations sont gratuites et on a un rendez-vous dans la semaine alors qu’en ville, il faut parfois attendre très longtemps. Et puis les gynécos et les conseillers n’ont pas d’a priori, ils ne jugent pas les gens. C’est surtout pour les gamines qui viennent ici que ça m’inquiète”, ajoute-t-elle.
Justement, des gamines, on en rencontre beaucoup dans cette salle d’attente. Le Planning familial de Marseille est l’une des plus grosses structures de la région avec celui du Vaucluse. Trente salariés, un cabinet médical avec quatre médecins, un centre de dépistage et surtout des interventions dans les collèges et les lycées et dans les fameux quartiers Nord. C’est par ce travail de terrain que l’association touche des jeunes, comme Louisa, 21 ans, et Elodie, 19 ans. Elles habitent le XIVe arrondissement – sans savoir que leur maire n’est autre que le frontiste Stéphane Ravier. “C’est les copines qui nous ont dit de venir, ça marche par le bouche à oreille”, expliquent-elles.
Louisa revient pour voir un gynécoloque, mais la première fois, elle était venue “pour en savoir plus sur la contraception”. Pas évident de trouver des interlocuteurs lorsqu’il s’agit d’aborder la sexualité à l’heure des premiers rapports. “Si ça fermait, les filles des quartiers seraient égarées !”, lâche-t-elle. La structure a l’avantage d’être située juste à côté de la gare Saint-Charles, qui rallie tous les transports en commun. Particularité marseillaise, elle a beau être en plein centre-ville, elle est sise à la Belle de mai, l’un des quartiers les plus pauvres d’Europe. L’an dernier, 6 700 personnes ont passé la porte de l’association.
une décision paradoxale
“On a toutes les populations, explique Fanny Jamet, la directrice. Plutôt des jeunes filles, mais aussi des dames à l’âge de la ménopause. Et contrairement à l’image qu’on nous donne en parlant tout le temps des IVG, une grande part de notre activité concerne les violences faites aux femmes”, ajoute-t-elle. Un numéro vert a été mis en place en réseau dans la région pour aider et orienter les victimes. Si les subventions sont coupées, ce sera l’un des premiers services à sauter. Ça et la prévention dans les lycées. “La proposition de madame Le Pen est paradoxale, souligne Diane Lindeckert, qui dirige le Planning du Vaucluse : si on veut réduire le nombre d’avortements, c’est justement en travaillant sur