Des artistes dans le siècle
Une série documentaire écrite par Dan Franck raconte les affres de l’avant-garde au début du XXe siècle à Paris. Des récits de vies haletants, de Montmartre à Montparnasse, de Picasso à Desnos…
Paris. Par-delà la question du terrorisme, l’émotion collective que les attentats du 13 novembre ont suscitée à l’étranger tient probablement à la réputation d’une ville où brilleraient en toute majesté les poètes, les artistes et la jeunesse désinvolte aux terrasses des cafés. La scène primitive de cet imaginaire folklorique remonte au début du XXe siècle : un temps que l’écrivain Dan Franck baptise “le temps des bohèmes” dans son dernier livre. Rassemblant trois récits successifs – “Bohèmes”, “Libertad !”, “Minuit” –, évoquant les vies des artistes à Paris entre 1900 et 1945, Le Temps des bohèmes fait l’objet d’une magnifique adaptation télévisuelle avec la série documentaire Les Aventuriers de l’art moderne, réalisée par Amélie Harrault, Pauline Gaillard et Valérie Loiseleux, produite par trois autres femmes, Judith Nora, Elisa Larrière et Priscilla Bertin (Silex Films).
Découpée en six épisodes selon des critères à la fois chronologiques et thématiques, la série plonge au coeur de deux quartiers parisiens, Montmartre et Montparnasse, véritables épicentres de l’avant-garde artistique de l’époque, peuplée de jouisseurs en tout genre, fauvistes, dadaïstes, cubistes, surréalistes. Des artistes qui incarnent l’art moderne dans ses dimensions les plus larges : Pablo Picasso, Georges Braque, Guillaume Apollinaire, André Derain, Man Ray, Max Jacob, Henri Matisse, Chaïm Soutine, Modigliani, Kiki de Montparnasse, Dora Maar, André Breton, André Gide, Louis Aragon, Nancy Cunard, Lee Miller, Paul Eluard, Jean Cocteau, Robert Desnos… “Quand le siècle commence, Montmartre et Montparnasse se regardent : deux collines d’où vont naître les beautés du monde d’hier, et aussi celles d’aujourd’hui, écrit Dan Franck. A droite, le Bateau-Lavoir. A gauche, les fumées de la Closerie des Lilas. Entre les deux, coule la Seine. Et toute l’histoire de l’art moderne.”
Le récit se construit directement à partir de cette topographie, en affinant à chaque épisode l’analyse des microlieux qui constituent les deux scènes d’un même théâtre parisien. Les six volets des Aventuriers de l’art moderne dévoilent avant tout la géographie pointilleuse de deux espaces populaires, au coeur desquels s’inventent des modes de vie et se constituent des bandes organisées. La bande du Bateau-Lavoir, celle du Lapin Agile, du café La Source, du club Le Jockey, la bande de La Rotonde ou celle de La Coupole… s’organisent toutes, les unes après les autres ou en même temps, en fonction d’un seul principe :