Daniel Romano
Mosey New West/Pias
Un rescapé de la country dévoile un album pop où les mélodies sont reines. Un disque hybride invoquant tour à tour Lee Hazlewood, Ennio Morricone et Gainsbourg.
Après avoir gratté les os de la country à papa sur une poignée d’albums solo, Daniel Romano prend ses distances avec le Nashville sound et s’offre une mue pop salutaire. Comme pour mieux enquiquiner les disquaires (et les critiques) qui lui auraient trop vite collé sur le museau une étiquette gardien de vaches. Pourtant, cette versatilité ne devrait pas nous surprendre. Nourri minot au son de Merle Haggard, de George Jones et des Byrds, l’Ontarien a commencé sa carrière au sein d’une formation punkoïde (Attack In Black) avant de virer sa cuti pour des paysages plus bucoliques.
Composé entre Berlin et ses terres natales, Mosey est le grand disque d’un songwriter qui abandonne enfin la position de puriste. En croisant sa musique de cow-boy avec tout ce qui lui passe à portée d’oreille, ce multi-instrumentiste ingénieux vient de réussir un coup d’éclat : douze titres sertis d’arrangements cossus, tiraillés entre americana, funk, pop sixties, western spaghetti ou blues tex-mex. Dans une fascinante exploration pop, Romano se glisse avec humilité et une aisance virtuose dans les oripeaux des grands maîtres, de Randy Newman (One Hundred Regrets Avenue) à Leonard Cohen (Sorrow), de Dylan (Gone Is) All But a Quarry of Stone) à Ennio Morricone (Valerie Leon) en passant par Gainsbourg (l’interlude yéyé à la fin de Toulouse).
Mais c’est sans doute Lee Hazlewood qui reste l’inspiration la plus évidente du Canadien. Au pygmalion de Nancy Sinatra, Romano a piqué tout ce qu’il a pu : ce timbre profond et imbibé, cette science de l’empilement, ce goût pour la country gothique et les voix féminines. Tout ça en gardant intact son sens mélodique et son songwriting émouvant, à l’image de cet I Had to Hide Your Poem in a Song qui ferait pleurer un mur.
Le garçon est si prolifique qu’il s’apprêterait déjà à publier un disque punk sous influence Buzzcocks-Television. Décidément, ce cow-boy est hors du jeu ! Romain Burrel
concert le 19 juin à Saint-Etienne danielromanomusic.com