Cher Eric Zemmour
J’étais loin d’imaginer que, sous ton costard mal coupé d’éditorialiste phallocrate, se dissimulait la paire de loches d’une Femen. Je te pensais capable de toutes les provocs, de tous les outrages, des profanations les plus indécentes, je te reconnaissais même ce courage d’aller toujours plus loin dans la coloscopie à vif d’une société qui te répugne tant, mais j’avais sous-estimé ton audace de troll tout-terrain.
Contrairement aux fois précédentes, où l’on donna de façon disproportionnée écho à tes délires identitaires et à tes thèses mortifères, ta dernière “oeuvre” de malfaisance serait presque passée inaperçue si un journaliste bien informé, Claude Askolovitch, n’en avait fait sur Slate l’hallucinant récit. Je résume : le 1er juin, tu étais invité à un débat à la grande synagogue de la Victoire aux côtés de l’ancien grand rabbin de France, Gilles Bernheim, le tout animé par ton copain du Figaro, Yves Thréard. Coiffé d’une kippa – je pense que c’est la règle, dans une mosquée on t’aurait demandé de laisser à l’entrée tes mocassins à glands –, tu t’es livré ce soir-là à une défense sans réserve du… régime de Vichy.
Même les bulles dans les bouteilles de la même provenance faillirent crever de rage lorsque tu estimas que Pétain et ses sbires avaient protégé les Juifs français au détriment des Juifs étrangers, qui, justement parce qu’ils étaient étrangers, n’avaient qu’à bien aller se faire foutre. Encore un ou deux calvas et tu n’étais pas loin d’affirmer que l’étoile jaune de 1942 n’était qu’un petit accessoire vestimentaire sympa pour les amateurs de western.
“A l’époque, te risquais-tu à avancer, on estime que les Juifs ont pris trop de pouvoir, qu’ils ont trop de puissance, qu’ils dominent excessivement l’économie, les médias, la culture française comme d’ailleurs en Allemagne et en Europe, et d’ailleurs c’est en partie vrai…” A t’entendre, les Français collabos et les exécuteurs de basses oeuvres du maréchal n’étaient pas le moins du monde antisémites, c’était juste les Juifs qui étaient exagérément juifs, ce qui, traduit en langage Radio Courtoisie, signifie “arrogants et dominateurs”.
Franchement, Zozo, venir dans une synagogue pour réciter du Brasillach, c’est bien plus grave que de montrer ses nichons dans une église, mais personne alors, parmi cette assistance à la mémoire ainsi diffamée, n’osa t’éjecter à grands coups de pompes dans le cul. On se reportera au texte d’Askolovitch (un journaliste juif arrogant et dominateur, objecterastu sans doute) pour le détail de tes falsifications historiques. Et on attendra désormais d’autres interventions du même ordre, d’autres belles idées de parasitages masochistes, pourquoi pas Christine Boutin en string rose à la Gay Pride, Pierre Gattaz tapant la merguez en bleu de travail avec la CGT, Emmanuel Macron à un congrès du PS ou Patrick Balkany en vedette à l’arbre de Noël du Trésor public. Et Dieudonné à ta place l’an prochain ?
Je t’embrasse pas, je t’emmerde, et ce n’est pas qu’en partie vrai.