Fight spirit
Plus de vingt ans après, deux documentaires s’intéressent à la vie (et à la mort) de Kurt Cobain : l’un hagiographique, l’autre à charge contre Courtney Love. Celui qui reprend l’enquête, c’est Tom Grant, un détective d’abord engagé par Courtney Love
Deux docs, deux ambiances. Le premier, Montage of Heck de Brett Morgen, a fait son petit effet lors de sa sortie l’an dernier. C’est l’histoire de Kurt Cobain comme on l’avait fantasmée à l’écoute de ses disques, à la lecture de son journal : un portrait intense et bordélique, griffonné à partir de films et de photos de famille, d’interviews de ses proches, de documents qui ont jalonné l’histoire de Nirvana. Un film qui s’écoute autant qu’il se regarde, comme un long clip biographique, et un beau chapitre posthume à l’oeuvre de Kurt Cobain. “Il faut savoir que 90 % de ce qui est dit dans ce film est bidon”, a déclaré le chanteur des Melvins, ami de jeunesse de Kurt Cobain. Supervisé, autorisé et produit par la veuve et la fille de Cobain, Montage of Heck est plus une hagiographie trash que la manifestation de la vérité vraie. N’empêche : c’est un vrai trip à regarder.
“Qui a tué Kurt Cobain ?”, demande le réalisateur Benjamin Statler. Ce second documentaire n’a pas été approuvé par la famille du mort, puisque la réponse à la question est : Courtney Love. Montage of Heck se termine par ces mots expédiés : “Un mois après son retour de Rome, Kurt Cobain mettait fin à ses jours. Il avait 27 ans.” Qui a tué Kurt Cobain ? interroge la suite. Que s’est-il vraiment passé dans la serre de sa maison de Seattle ? Comment peut-on se tirer une balle de fusil après avoir pris autant d’héroïne ? La porte était-elle vraiment fermée de l’intérieur ? Que vient faire “Cali” dans cette affaire ? Qui avait intérêt à la mort de Kurt ? La police a-t-elle bâclé l’affaire ? avant de se retourner contre sa cliente qu’il soupçonne d’avoir commandité la mort de Cobain. La thèse de l’assassinat déguisé en suicide n’est pas nouvelle, et elle est étayée. Le problème de ce docu qui n’en est pas vraiment un, c’est sa forme fictionnelle : reconstitutions avec des acteurs, images laides et lourdes comme dans un thriller de David Fincher, musique plombante. Le spectateur est manipulé par cette mise en scène conforme aux codes des pires docu-fictions criminels. Du coup, si la vérité est dans ce film, elle est encore plus pénible à voir qu’à entendre. Stéphane Deschamps
Kurt Cobain – Montage of Heck documentaire de Brett Morgen. Mardi 5, 22 h 50, Ca nal+ Qui a tué Kurt Cobain ? documentaire de Benjamin Statler. Mercredi 6, 20 h 45, P lanète+