Les Inrockuptibles

Le premier endroit où Leonard Cohen a entendu le mot “hallelujah”, c’est ici

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de reprendre la mélodie de la prière propre aux Cohanim. La bénédictio­n que Leonard Cohen entendait lorsqu’il allait petit à la synagogue.

Si le retour à son enfance est important, c’est aussi parce que, lors de sa retraite dans un monastère entre 1994 et 1999 (période au cours de laquelle, il n’enregistra pas le moindre morceau), Leonard Cohen se fait ordonner moine bouddhiste zen (en 1996). Son détachemen­t public de ses racines reste officieuse­ment, pour Gideon, ni plus ni moins qu’une recherche spirituell­e héritée des sixties. “Beaucoup d’artistes étaient en quête de spirituali­té. Pour d’autres, c’était le sexe, la drogue ou l’activisme politique. Pour Leonard, c’était la méditation.”

Cette quête de spirituali­té reste chevillée au corps de Leonard Cohen. Sa famille voyait en lui un guide. “On s’attendait à ce que je grandisse et devienne un homme qui dirige d’autres hommes”, lit-on dans la biographie de Loranne Dorman et Clive Rawlins consacrée au poète et chanteur, Prophet of the Heart. Le poids de la religion a ainsi toujours travaillé ses oeuvres. Dans son premier roman, The Favourite Game (1963) – Jeux de dames pour la traduction française –, Lawrence Breavman, le personnage principal, un garçon juif d’une famille pratiquant­e, s’entretient avec un ami qui lui dit : “Tu sais, Breavman, tu n’es pas le serviteur souffrant de Montréal.” Il répond : “Bien sûr que je le suis. Ne peux-tu pas me voir crucifié sur un érable au sommet du mont Royal ?” Pour se délivrer de ses questionne­ments, ce retour à la synagogue prend son sens. Le premier endroit où Leonard Cohen a entendu le mot “hallelujah”, c’est ici. S’il cherchait une forme d’authentici­té pour son dernier album, il ne pouvait pas aller ailleurs.

Depuis Los Angeles, où il réside, Leonard Cohen reste en contact avec la synagogue. Il fait d’importante­s donations et prend soin de communique­r régulièrem­ent avec Gideon Zelermyer. Dans le bureau Montréal, octobre 2016. Ci-dessus, les portraits de Lazarus (en haut) et Lyon Cohen, respective­ment arrière-grand-père et grand-père de Leonard du ténor, l’interphone ne transmet plus les chants des enfants. Les maternelle­s sont partis récupérer des torahs en peluche dans une boîte en plastique. Assis au premier rang sur un banc en bois, un petit garçon porte une kippa customisée aux couleurs vives. Le petit Leonard Cohen était aussi en maternelle à Shaar Hashomayim, lui aussi faisait ses prières en chantant. Près de l’entrée principale de la synagogue, une photo de classe datant de 1949 cristallis­e sa présence. Le jeune homme sourit dans son costume complet croisé. Gideon rit en imaginant que Leonard Cohen a pu lui aussi jouer avec des torahs en peluche.

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