Les Inrockuptibles

Wallace & Gromit – Les inventurie­rs de Nick Park

Les premiers pas d’un géant de l’animation humoristiq­ue.

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(G.-B., 1989/1993, 54 min)

Ce film réunit les deux premiers courts métrages de Nick Park, La Grande Excursion (1989) et Un mauvais pantalon (1993), qui mettent en scène Wallace, un Anglais moyen mais ingénieux, et son chien Gromit, à l’intelligen­ce supérieure. Les studios Aardman de Bristol, dont Nick Park est le plus éminent fleuron, ont changé la face du cinéma d’animation. Sans eux, il n’y aurait sans doute plus que de simples dessins animés, et Ma vie de courgette n’aurait pas existé. Park a relancé le goût pour la pâte à modeler filmée image par image (stop motion), qui a largement repris du poil de la bête ces derniers temps. Mais à ce jour personne n’a encore atteint le degré de sophistica­tion faussement artisanale et de profonde facétie animant l’homme et le chien de Nick Park, hérauts allumés de l’absurde.

La première force de ces aventures est le puissant contraste entre la banalité de la vie anglaise, son décorum ennuyeux, et le contexte dans lequel elle est transposée. Voir la reproducti­on du home sweet home british, avec ses tasses de thé et son papier peint dans le vaisseau spatial de Wallace et son chien, qui cingle vers la Lune en quête de fromage (dans La Grande Excursion). Cela s’inspirant de Jules Verne et de son émule Georges Méliès. Le futurisme jouissivem­ent archaïque de Park atteint un sommet d’abstractio­n poétique avec l’irruption de l’invraisemb­lable machine à sous lunaire qui rêve d’aller faire du ski sur la Terre. Il y a une vraie folie technoïde (comme chez les Nippons Miyazaki ou Otomo) dans ce cinéma à priori destiné aux enfants. En témoigne le redoutable pantalon robot d’Un mauvais pantalon, qui devient un potentiel engin de mort. Comme tout grand cinéaste, Park est un visionnair­e. Il voit à la fois la réalité ordinaire et l’au-delà de cette réalité. Vincent Ostria

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