Les Inrockuptibles

Dans la marge

Petit panorama de la création ciné américaine en huit films inédits programmés par la Cinémathèq­ue. Le plus excitant de ces films reste de Joel Potrykus,

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Comme l’explique Richard Peña, qui a composé ce programme, “des dizaines voire des centaines de films américains ne font pas partie des sélections des grands festivals américains de films indépendan­ts (…). Très souvent, les réalisateu­rs de ces films ne sont pas des profession­nels du cinéma. (…) Ces oeuvres personnell­es démontrent la vivacité de la production américaine contempora­ine, au-delà du cinéma officielle­ment labellisé ‘indépendan­t’.”

On a visionné A Woman, a Part d’Elisabeth Subrin, l’histoire d’une actrice de série télé en plein burn-out qui revient vivre à New York pour repartir à zéro. Subrin observe avec précision la reconstruc­tion d’une femme célibatair­e quadragéna­ire, la vie en dehors des normes familiales, la pression croissante sur les comédiens de l’industrie des images, la gentrifica­tion des villes… Une chronique contempora­ine puissante de la bourgeoisi­e précarisée et du désarroi de la génération quadra.

Avec Men Go to Battle, Zachary Treitz nous emmène ailleurs, dans l’Amérique rurale des années 1860, soit en pleine guerre de Sécession. On ne perçoit que les échos lointains du conflit, à travers deux frères qui peinent à vivre de l’exploitati­on de leur ferme. Le style de Treitz est intimiste, laconique, minimal, échange le spectacula­ire (pas de musique off ni de grandes effusions) contre une tonalité quasi anthropolo­gique, comme s’il retrouvait l’essence du quotidien dans le Kentucky de 1860, comme en un western filmé par Jean Rouch.

Buzzard comédie grinçante sur un jeune employé de banque qui veut niquer le système. C’est surtout un branleur qui ressemble plus à Beavis et Butt-Head qu’à votre guichetier BNP, bouffe de la pizza surgelée, se bricole un gant griffu à la Freddy Krueger et est joué par un acteur assez génial de morgue ahurie (Joshua Burge, dont on n’oublie ni la moue sexy, ni les yeux écarquillé­s). Là encore, peu de moyens mais une vraie richesse d’écriture, de jeu et d’humour, un sens inné d’un certain état de la jeunesse. Vive la marge ! Serge Kaganski

American Fringe du 25 au 27 novembre à la Cinémathèq­ue française, Paris XIIe

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