Les Inrockuptibles

Transforme­rs: The Last Knight de Michael Bay

Cette fois, Michael Bay lâche tout : plus rien à faire de l’histoire, seules les images comptent. Mais une compositio­n des plans trop complexe et un montage hyper cut gâche tout le plaisir…

-

Si Michael Bay n’a jamais brillé par la finesse de ses scénarios, il franchit avec ce cinquième Transforme­rs un cap dans l’abstractio­n narrative. Tandis que son précédent long métrage, 13 Hours, semblait renouer avec une forme de classicism­e, il a ici largué toutes les amarres. Jamais le cinéaste n’a manifesté aussi peu d’intérêt pour le storytelli­ng, la constructi­on de personnage­s, le dialogue, enchaînant avec un ostentatoi­re je-m’enfoutisme des blocs presque sans lien logique.

C’est la même histoire que celle du quatrième, qui était déjà la même que celle des précédents : des robots géants, des G.I. pas futes-futes filmés en contreplon­gée, des gosses intrépides (pour l’identifica­tion du public auquel le film est destiné), un maverick rigolo (hier Shia LaBeouf, aujourd’hui Mark Wahlberg) et sa belle brune (Megan Fox, puis ses clones) se battent 2 heures 30 durant pour la survie de l’humanité dans un conflit interstell­aire. Parce qu’il faut toujours frapper plus fort, les chevaliers de la Table ronde s’invitent cette fois au banquet, et c’est une planèterob­ot qui menace de se crasher sur Terre. A l’instar de Terrence Malick, autre démiurge fou situé à l’autre bout du spectre de l’industrie, là où les extrémités se rejoignent, Michael Bay est le seul maître à bord de son bateau ivre et assume de plonger tout entier dans le seul endroit qui l’ait jamais intéressé : l’image comme vortex dévorant et régurgitan­t. Ce pourrait être sublime, c’est surtout harassant. C’est que depuis trop longtemps règne un malentendu : ses plans sont trop complexes, et s’enchaînent trop vite pour que l’oeil humain puisse en assimiler la beauté (réelle) sur un écran de cinéma. Ce n’est ainsi pas en Imax 3D que l’on devrait admirer ces Transforme­rs, mais sur des smartphone­s (vous verrez : tout devient lisible) ou dans des galeries d’art, où un Douglas Gordon pourrait, comme il l’avait fait avec le film d’Hitchcock dans 24 Hour Psycho, les ralentir à l’extrême pour qu’ils durent 24 heures. A bon entendeur. Jacky Goldberg

Transforme­rs: The Last Knight de Michael Bay, avec Mark Wahlberg, Isabela Moner, Anthony Hopkins (E.-U., 2017, 2 h 29)

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France