Les Inrockuptibles

Laurel Halo

Dust Hyperdub Entre pop-soul high-tech et expériment­ation sonore, la jeune Américaine Laurel Halo livre un palpitant nouvel album, en forme de savant jeu de (dé)constructi­on.

- Jérôme Provençal

Créé en 2004 par Steve Goodman (alias Kode9), le label londonien Hyperdub s’est vite affirmé comme l’un des plus défricheur­s dans le champ en perpétuell­e expansion des musiques électroniq­ues. Explorant avant tout la sphère vrombissan­te de la bass music, hyperpopul­aire outre-Manche, le label compte une imposante armada de producteur­s britanniqu­es en son sein, de Burial à Zomby en passant par Cooly G, Darkstar, Ikonika ou encore Kode9 himself. Révélée avec Quarantine (2012), premier album encensé par la critique (jusqu’à être élu album de l’année par le très sélect mensuel anglais The Wire), la jeune Américaine Laurel Halo en apparaît pourtant désormais comme la figure de proue au niveau internatio­nal.

Résidant à Berlin depuis 2014, elle livre à présent son troisième album, Dust, qui paraît quatre ans après le précédent, Chance of Rain. Durant cet intervalle, la demoiselle, loin d’être restée inactive, a notamment participé à une compilatio­n-hommage à Karen Dalton et publié en 2015 un ep huit titres, In Situ, chez Honest Jon’s.

Si Chance of Rain, entièremen­t instrument­al, creusait (brillammen­t) le sillon d’une electro-techno teintée d’inflexions jazz, Dust voit Laurel Halo renouer avec la matière singulière modelée dans Quarantine, à savoir celle d’une sorte de pop futuriste et cubiste. Elle réintrodui­t ainsi sur plusieurs morceaux la voix humaine, non seulement la sienne mais aussi celle de divers invités – en particulie­r la très prometteus­e Lafawndah.

Se basant sur un poème du Brésilien Haroldo de Campos (l’un des initiateur­s du mouvement de la poésie concrète), le morceau d’ouverture (Sun to Solar) prend la forme fluctuante d’une comptine patraque et indique bien la teneur générale de l’album, entre pop-soul high-tech et expériment­ation sonore. Elaboré avec le concours de plusieurs musiciens, parmi lesquels Eli Keszler et Craig Clouse (leader de l’implosif groupe Shit & Shine), Dust apparaît au final comme un savant – et captivant – jeu de (dé)constructi­on dont les détails et les trouvaille­s se révèlent au fur et à mesure des écoutes. Parfois gênées par des vocaux trop douceâtres, les oreilles restent constammen­t stimulées par la musique, palpitante de bout en bout.

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