La chronique des disques en accéléré
MICAH P. HINSON creuse toujours son sillon country gothique, FINK, lui, poursuit dans le post-blues, YASUAKI SHIMIZU propose des miniatures musicales, une réédition des BARK PSYCHOSIS nous replonge dans l’ambient 90’s, LEE RANALDO la joue power-pop bien a
AUJOURD’HUI, CERTAINS D’ENTRE VOUS REGARDENT BRÛLER LE CIERGE
qu’ils ont allumé à la mémoire de Johnny Cash, disparu le 12 septembre 2003. Aux inconsolables du chanteur à grosse voix, et aux autres aussi, on conseille d’essayer le nouvel album de
Micah P. Hinson. D’abord parce qu’il chante bas. Aussi, question d’AOC, parce qu’il est né à Memphis. Et qu’il y finira sans doute ses jours. Ou derrière une colline des Appalaches. Ou dans une ville fantôme du Texas. Depuis le milieu des années 2000, Micah sort des albums qui se ressemblent sans se répéter, qui visitent sans hâte ni relâche l’Amérique perdue, de préférence de nuit. The Holy Strangers fait tout pareil : country gothique et folk baroque au ralenti, comme une séance d’hypnose ou de spiritisme. Un Holy et au lit, boots de cowboy aux pieds (du 16 au 22 octobre en tournée française).
Pour se réveiller tard, et tout en douceur, on enchaînera avec Resurgam de Fink. Deuxième album cette année pour le chanteur, après l’intense et surprenant album de post-blues
Fink’s Sunday Night Blues Club. Fink soigne encore son blues, mais via une écriture plutôt folk-soul, dans des chansons aux arrangements brumeux et moirés – la production est signée Flood, toujours parfait d’élégance et de moelleux (en France les 31 octobre, 10, 11 et 14 novembre).
Et tout de suite, une page de pub, avec la réédition de l’album Music for Commercials du Japonais Yasuaki Shimizu. Sorti en 1987 dans la très chic et pointue collection Made to Measure du label Crammed, ce disque compile vingt-quatre miniatures musicales composées pour des pubs télé au Japon. Le track-listing est un catalogue des produits de l’époque (Seiko, Ricoh, Shiseido, Sharp, Knorr, Honda, Bridgestone…) et la musique est un enchantement de petites pièces voletant entre electronica rêveuse, jazz minimaliste et musique de chambre contemporaine. Un grand moment de subversion rétromaniaque : on peut enfin adorer des musiques de pubs sans connaître les pubs en question, juste en les imaginant. Pour sûr, un disque qui donne vraiment envie d’acheter des pneus Bridgestone.
Qui dit rétromania pense Simon Reynolds (auteur du livre du même nom), et on se souvient que c’est lui qui avait inventé le terme “post-rock” en 1994 dans The Wire, pour la sortie de Hex, premier album des Anglais
Bark Psychosis. Cotonneux kaléidoscope, ce totem des années 1990 versant ambient est réédité cette semaine, paisible, inaccessible, immuable et fascinant comme des nuages d’altitude. C’est dans ce genre d’album que s’est inventé le futur (c’est-à-dire aujourd’hui).
A l’époque, les gens qui écoutaient Bark Psychosis aimaient aussi beaucoup Sonic Youth, et ils auront raison d’accorder une oreille au nouvel album de l’ex-SY
Lee Ranaldo. En apparence formatées power-pop, riches en mélodies, les chansons d’Electric Trim ne sont jamais banales, toujours pleines de chausse-trappes, de surprises et d’arrangements en cascade. Le disque idéal à écouter au volant d’une voiture de luxe, sous un énorme orage de grêle.
Cabosser la voiture, ne plus se laver, se nourrir uniquement de poulet frit et rouler jusqu’au Mississippi à la découverte de
RL Boyce, 62 ans, qui sort Roll and Tumble, un chouette album de blues destroy pour danser défoncé au moonshine, comme au temps béni de RL Burnside, T-Model Ford et des productions du label Fat Possum. On les croyait tous morts, il y en a un qui bouge encore. Albums The Holy Strangers de Micah P. Hinson (Full Time Hobby/Pias), Resurgam de Fink (Ninja Tune), Music for Commercials de Yasuaki Shimizu (Crammed), Hex de Bark Psychosis (Fire Records), Electric Trim de Lee Ranaldo (Mute/Pias), Roll and Tumble de RL Boyce (Waxploitation)