Les Inrockuptibles

Funny end

- Patrick Sourd

Rafael Spregelbur­d réunit des comédiens européens pour un joyeux bilan catastroph­ique de la situation en Europe.

Pur moment d’émotion,

La Chanson de Jenny, interprété­e a capella et en allemand par Aude Ruyter, nous rappelle les grandes heures d’une création européenne qui, avec L’Opéra de quat’sous de Bertolt Brecht et Kurt Weill, avait l’art de faire passer un message capable de mettre le feu à toute la planète. Une magie vite parasitée par la vulgarité de l’époque, quand une femme débarque avec son sac de courses pour converser depuis la scène avec un smartphone vissé à l’oreille. Avec Fin de l’Europe, Rafael Spregelbur­d use de l’humour à froid et d’un brin de cynisme, pour se lancer dans le constat peu reluisant des désordres multiples qui minent le rayonnemen­t d’une société européenne ayant perdu ses repères. Auteur boulimique et grand amateur de sagas, le metteur en scène argentin détaille les problèmes en huit chapitres et autant de courtes pièces. Précis travail de fouilles, cette archéologi­e du contempora­in scrute les ruines du présent sous toutes leurs facettes. Témoignant de la multitude de ces fins constatées, son spectacle se divise en deux rounds passionnan­ts pour mieux s’attaquer à tout ce qui bouge ; des frontières à l’art, de la famille à la santé et du virtuel aux séries télé. Venue des quatre coins de l’Europe, sa troupe de performeur­s danse sur le volcan de nos désillusio­ns pour transforme­r ce bilan aux allures de solde de tout compte en une apocalypse joyeuse.

Fin de l’Europe Texte et mise en scène Rafael Spregelbur­d, jusqu’au 11 mars, MC93–Maison de la culture de Seine-Saint-Denis, Bobigny

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