Les Inrockuptibles

Flotter dans le flux

- Jean-Marie Durand

Pour Samuel Partaix, la pratique du skate et du surf s’apparente à un certain art de vivre.

Plus qu’un art en soi, Samuel Partaix a fait du skate et du surf un mode de vie plein et entier (jusqu’au premier bras cassé après une chute). Un mode de vie artistique au sens où les images qu’il réalise lui-même de ses envols dévoilent un sens achevé de la mise en scène de sa pratique. Son compte Instagram est plein de ses sauts et courbes déployés dans le monde entier, qu’il parcourt à partir de ses deux villes fétiches, Biarritz, où il surfe, et Paris, où il ride. L’un de ses clichés les plus connus le représente en plein saut, comme en suspension, au-dessus du photograph­e Dimitri Costes, à Paris. Comme ses tricks, ses kickflips, ses grinds, ses slides et ses chutes, ses longues courbes témoignent de son désir d’installer dans sa vie des rapports de flux plutôt que des rapports de force. Une vie à la coule, en somme. Le cool, Sam Partaix pourrait en être une incarnatio­n, au sens où son art de la glisse ne défend rien d’autre que lui-même : un art de la présence flottante au monde, du rythme approprié, de l’ajustement aux aléas des villes, des vies et des îles. La mobilité du corps et l’intelligen­ce de la situation sont ses seules armes pour traverser l’existence, détaché de toute contingenc­e et autres nécessités concrètes. “Glisser, c’est le contraire de s’enraciner”, disait Jean-Paul Sartre à propos du ski. Depuis qu’il a commencé au début de l’adolescenc­e à avancer sur une planche (de salut), Sam Partaix s’est imposé comme le skateur emblématiq­ue d’une large confrérie, qui comme l’écrivait le philosophe Elie During oscille constammen­t “entre la maîtrise de soi et le débordemen­t”, en mixant virtuosité et vertige. Ses vertiges suffisent à son art de vivre, un art créatif.

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