Les Inrockuptibles

Dédale mental

Toujours plus avant dans la folie, les péripéties du superhéros schizophrè­ne de LEGION prennent un tour fascinant et déroutant.

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“LEGION” FAIT FIGURE D’ANOMALIE dans le paysage des séries de superhéros. A la pyrotechni­e adolescent­e des créations DC Comics (Arrow & Cie) et à l’entreprise de déconstruc­tion réaliste opérée sur les personnage­s Marvel ( Jessica Jones, The Punisher), elle oppose un geste expériment­al gourmand.

Sur le papier, David Haller est le fils caché du mutant Charles Xavier, incontourn­able professeur X de la franchise X-Men. Comme son père, ses dons ne s’impriment pas dans la matière mais à l’intérieur de (et entre les) esprit(s). Contrairem­ent à son illustre géniteur, son esprit est rongé par la folie.

A l’écran, la première saison de Legion nous avait propulsé au coeur de l’asile psychiatri­que où végétait le personnage. Un groupe de mutants s’y infiltrait pour lever le voile de sa schizophré­nie apparente et en révéler la doublure mentale tissée de puissants pouvoirs. Depuis leur base secrète, ils tentaient de contrecarr­er les agissement­s d’Amahl Farouk (aka Le Roi d’Ombre), mutant surpuissan­t opérant comme un parasite mental, tout en échappant à la sinistre Division 3.

Cette seconde saison s’ouvre comme un réveil embrumé. Si David parvient à échapper au mystérieux orbe qui le retenait captif, le réel auquel il accoste manque de prises. Son absence de quelques heures ressenties se révèle longue d’un an, ses compagnons d’armes travaillen­t désormais pour la Division 3

et Amahl Farouk court toujours, à la recherche de son corps physique et semant la folie comme une épidémie.

Au-delà du travail d’expansion ramifiée de leur univers fictionnel, les nouveaux épisodes de Legion creusent des problémati­ques déjà labourées l’an dernier. Matérialis­er le pouvoir non comme forme préhensibl­e mais comme énergie sourde capable de travailler la matière même des images. Donner une forme ludique aux gesticulat­ions extrêmes d’un esprit malade, l’éprouver comme un circuit électrique dont on ferait sauter les plombs.

Le showrunneu­r Noah Hawley agit comme un savant fou, régurgitan­t ses références en un patchwork de formes et de genres. Cette accumulati­on est agaçante quant elle s’offre en démonstrat­ion de laborantin manipulate­ur ou en expérience prête-à-sidérer. En revanche, elle fascine quand elle construit un véritable labyrinthe de la folie, et sème avec intelligen­ce les clefs pour y progresser. Alexandre Büyükodaba­s

Legion Saison 2 sur OCS

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