GRUFF RHYS En solo avec un orchestre symphonique

Leader abracadabrant des Super Furry Animals, GRUFF RHYS s’est entouré d’un orchestre symphonique pour un album solo époustouflant.

DÈS LES PREMIÈRES SECONDES DE “BABELSBERG”, le cinquième album solo de Gruff Rhys (le vingtième et des poussières, en comptant tous ses projets), la surprise est de taille. Le chanteur des Super Furry Animals n’est pas du tout seul face à ses pensées farfelues : un orchestre symphonique, le BBC National Orchestra of Wales, joue à ses côtés.

Pendant les dix morceaux qui suivent, on n’en finit pas de s’émerveiller devant la qualité de ce songwriting pétillant, de cette voix de nounours somnolent et des enluminures à couper le souffle des soixante-douze musiciens qui l’accompagnent, arrangées par le compositeur Stephen McNeff. “J’ai envoyé à Stephen une playlist d’arrangements qui me plaisaient, raconte Gruff Rhys avec son accent gallois.

Il y avait du Jean-Claude Vannier, Lee Hazlewood et Bobbie Gentry. Je voulais éviter à tout prix de faire du rock symphonique.”

Le songwriter le plus fantasque du courant britpop n’envisageait pas un tel résultat. “Quand j’ai écrit cet album, je travaillais sur un autre projet avec Stephen et je lui ai proposé de collaborer. Pour moi, un orchestre était hors de portée. Je pensais mettre des samples, au maximum un quartet, parce que ce sont des morceaux très personnels. Au final, Stephen m’a proposé cet orchestre qu’il connaissait et j’étais ravi. J’ai été attentif à ce que le côté symphonique n’envahisse pas l’intimité de ces chansons.”

Entre classicisme pop et démesure créative, ce mariage de déraison fonctionne à merveille et donne naissance à des trésors comme Negative Vibes, Oh Dear!, la ballade country Frontier Man, le splendide Selfies in the Sunset (en duo avec le mannequin Lily Cole, façon Nancy & Lee), ou le baroque Architecture of Amnesia. “J’ai rarement senti ma voix aussi exposée que sur cet album. Pendant longtemps, j’ai composé des chansons sans me soucier des notes que je devrais atteindre vocalement. Cette fois, j’ai essayé d’adapter la musique à mon timbre et c’est une petite révolution pour moi !”

Tout a été enregistré en trois jours, il y a un peu plus de deux ans, juste avant que Gruff Rhys dévoile la chanson anti-Brexit

I Love EU, en amont du référendum britannique de juin 2016, pour encourager ses compatriotes à voter pour rester dans l’Union européenne. Depuis, on a pu suivre ses aventures sur ses différents réseaux sociaux, qu’il regroupe sous le nom de Gruffington Post. A 47 ans, père de trois enfants, Gruff Rhys continue ses recherches de savant fou psychédélique. Rescapé de nombreuses années d’excès en tout genre, ce cerveau déglingué mais génial explore en zigzag toute l’histoire de la pop. Injustement abonné aux seconds rôles, il prouve ici qu’il fait partie des joyaux les plus précieux de la couronne britannique.

Album Babelsberg (Rough Trade/Beggars) Concert Le 19 novembre à Paris (Badaboum)