LE HEROS DE LA SEMAINE
Jerry Paper, grave groovy
Avec sa bonne trogne de réparateur Apple, Jerry Paper n’avait pas gagné sa place d’avance parmi nos héros possibles. Sûr, c’est pas Bowie, c’est pas Lemmy, c’est pas Queen B : c’est Jerry. Et c’est beaucoup. En feuilletant son carnet d’adresses, on se dit que l’Américain discret pourrait pourtant crâner : on ne collabore pas, on ne joue pas avec Mac DeMarco, BadBadNotGood ou Weyes Blood sans mettre un peu de génie sur la table. Mais c’est surtout en écoutant son troisième album Like a Baby, défloré par le magnifique single Your Cocoon, que l’on mesure toute la classe triple cool de Jerry Paper, qui s’appelle d’ailleurs Lucas Nathan dans la vraie vie. Comme chez les Parcels, tout est ici question d’excellence musicale, de précision harmonique sidérante. Comme si le punk ou la lo-fi étaient pour lui des langues étrangères et inextricables, le Californien vénère au contraire quelques-uns des plus maniaques trousseurs de refrains de l’histoire de la pop-music, de Steely Dan à Prefab Sprout. Mais il le fait tout en souplesse, cravate déliée, loin des masterclasses universitaires, avec un petit groove funky bien à lui, qui fait danser les tables de loi. Après les Pentagon Papers, les Panama Papers, voici le Californian Paper : il dénonce avec virulence le manque d’ambition et de modernité de la pop.