Les Inrockuptibles

Pupille de Jeanne Herry

Avec Sandrine Kiberlain, Elodie Bouchez, Gilles Lellouche (Fr., 2018, 1 h 47)

- Emily Barnett

Le double périple d’un enfant né sous X et d’une mère candidate à l’adoption. Une odyssée intimiste sans être larmoyante. “Pupille” est le nom donné aux enfants confiés à leur naissance aux services d’adoption.

Se met alors en place une procédure compliquée, au terme de laquelle le nourrisson trouvera sa nouvelle famille. De l’autre côté de ce périple administra­tif, il y a les parents adoptifs qui attendent longtemps, souvent plusieurs années, avant de pouvoir accueillir le petit orphelin qui deviendra leur enfant.

Le point fort de Pupille – second film après

Elle l’adore en 2014 d’une réalisatri­ce née de parents connus (Miou-Miou et Julien Clerc) –, c’est sa constructi­on, qui suit en parallèle les deux temporalit­és, celles de la future mère et du nourrisson. A l’attente angoissée de la première répond ainsi l’intranquil­lité du nouveau-né, soit une aphasie anormale, au point qu’un suspense réel se noue autour de ces deux solitudes en manque d’affection. Bien avant que ces deux-là se trouvent, il faut compter avec une série d’étapes qui auraient pu s’échouer en une litanie de séquences modèles et fastidieus­es, mais donnent vie au contraire, à ces entretiens entre intéressés et acteurs sociaux, entre sauvetage collectif et limites d’un système. Car Pupille n’est pas un documentai­re, mais bien une fable avec ses miracles et ses retourneme­nts, grâce au scénario, jamais fumeux et très écrit, et plus encore à ses comédiens, tous très inspirés : dans le rôle du tuteur provisoire, Gilles Lellouche est formidable en papa poule à rebours des clichés sur la virilité ; Kiberlain surjoue habilement l’assistante pudique et désinvolte ; et Elodie Bouchez, actrice revenante, ne se départ jamais d’une intense fragilité. Jouant avec ces fils entremêlés de la filiation, Jeanne Herry situe son film entre hasard, biologie et élection, sans jamais tomber dans le verrouilla­ge idéologiqu­e, ce qui n’est pas le moindre de ses mérites.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France