Les Inrockuptibles

Un violent désir de bonheur de Clément Schneider

Avec Quentin Dolmaire, Grace Seri, Francis Leplay, Vincent Cardona (Fra., 2018, 1 h 15), en salle le 26 décembre

- Marilou Duponchel

Les tourments d’un jeune moine sous la Révolution française. Un premier film original.

Premier long métrage de Clément Schneider présenté à l’Acid au dernier festival de Cannes, Un violent désir de bonheur scrute les bouleverse­ments de Gabriel – Quentin Dolmaire qu’on se réjouit de retrouver au premier plan après sa révélation en 2015 dans Trois Souvenirs de ma jeunesse d’Arnaud Desplechin –, moine dont le couvent vient d’être pris par des troupes révolution­naires. Nous sommes en 1792, et si dans la paisible campagne française les stigmates de la guerre demeurent invisibles, les changement­s qu’elle porte – en somme la transition de “l’ancien monde” vers le nouveau – chamboulen­t le quotidien d’ascète du garçon. Pour garder son couvent, Gabriel se voit obligé de troquer son épaisse étoffe de laine contre l’habit blanc des soldats et de cohabiter avec Marianne, esclave affranchie et muette.

En se plaçant davantage du côté du minimalism­e rohmérien que de la fresque historique, Un violent désir de bonheur contourne les codes du film en costume pour faire de son décor bucolique le réceptacle des mouvements de coeur et d’âme d’un jeune homme en pleine transition. Plus roman d’apprentiss­age que petite histoire de France, le film fait le récit d’une révolution intime agissant sur le héros comme une (re)naissance physique, intellectu­elle et sensuelle. Comme de petits Adam et Eve échoués dans les montagnes, Gabriel et Marianne vivront avec une seule consigne, que la jeune fille, une fois la parole retrouvée, finira par prononcer : aimer, croire et baiser. De la croyance (cinématogr­aphique), il en fallait pour que les tâtonnemen­ts d’un moine du XVIIIe siècle résonnent avec les préoccupat­ions, les contradict­ions, les désirs d’une jeunesse d’aujourd’hui. Parfois un peu rigide dans sa forme, ne parvenant pas totalement à s’abandonner à la volupté des amoureux enlacés, Un violent désir de bonheur porte tout de même la belle conviction que pour parler de son temps, mieux vaut parfois s’en éloigner.

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