Martin Kohlstedt
Ströme Warner Classics
Le pianiste allemand tisse huit nouvelles pièces où voix et piano se mêlent avec fougue. C’est l’histoire d’un réveil, celui d’un jeune pianiste allemand que l’on semble entendre dans l’intimité de sa chambre aux volets clos, et dont les mains tâtonnent quelques notes teintées de jazz sur une nappe de synthé. On jurerait, en tendant l’oreille, pouvoir l’entendre remuer derrière son instrument. Il ne faut pourtant pas se fier à la douce somnolence de Senimb, premier titre du nouvel album de Martin Kohlstedt. Ströme est un réveil vif et dansant qui, contrepied dans un genre ambient essentiellement instrumental, fait de la voix l’un de ses instruments les plus importants. En interaction avec la chorale du Gewandhaus de Leipzig, le compositeur originaire de Weimar parvient à faire de ses huit nouveaux morceaux de véritables espaces que les voix traversent et emplissent en se mêlant aux mélodies pianotées. La pièce Tarleh fait dans ce registre figure de chef-d’oeuvre, refusant tout compromis de tranquillité et laissant exploser en canon un choeur féminin conquérant alors que la main droite de Martin Kohlstedt dévale frénétiquement les touches. Evitant de s’enfermer dans des teintes rétrogrades qu’une chorale pourrait facilement imposer, le musicien contrebalance par la suite en usant de sons de synthé plus actuels, voire futuristes, qui lui permettent de rester cosmique en se détachant de l’hiératique.