Les Inrockuptibles

Anna, un jour de Zsófia Szilágyi

Avec Zsófia Szamosi, Leo Füredi, Ambrus Barcza (Hong., 2018, 1 h 38)

- Marilou Duponchel

Vingt-quatre heures dans la vie d’une femme. Un premier film sur la charge mentale, un peu trop démonstrat­if.

“Le cinéma, comme la peinture, montre l’invisible”, dixit Jean-Luc Godard dans un entretien accordé à L’Express en 2001. C’est à un phénomène de société daté et quasi invisible, mais dont les racines sont aujourd’hui encore robustes, qu’est consacré Anna, un jour qui, comme son titre le souligne, ambitionne une plongée, façon 24 heures Chrono, dans la vie tout aussi turbulente, quoique moins spectacula­ire, d’une femme. Ses vingt-quatre heures en paraissent quarante-huit voire soixante-douze tant la journée d’Anna, épouse, employée, mère, semble toujours s’allonger. Mari infidèle, horaires capricieux, enfants malades et turbulents, ménage, école, cours de danse… Du lever au coucher, la tête d’Anna est assaillie, alourdie par cette fameuse charge mentale, travail aveugle et domestique consistant à piloter sa vie de famille comme une véritable cheffe de chantier. On ne peut que souligner la force d’engagement de ce premier film, tout entier cramponné au quotidien si banal et pourtant si rude, et au corps robotisé de son héroïne. Mais sans doute qu’à trop vouloir révéler l’invisible des choses, la cinéaste finit par trop montrer. Démonstrat­ion implacable des infimes mécanismes d’inégalité persistant­s entre femmes et hommes, Anna, un jour, à travers la journée type d’un personnage­emblème, recueille un lot de pièces à conviction sociologiq­ues mais oublie de préserver l’intime d’une trajectoir­e, son ambiguïté, son trouble.

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