Les Inrockuptibles

Tombé pour la transe

- Patrick Thévenin

En combinant l’énergie techno et les mélodies orientales les plus festives, ACID ARAB forge des bangers taillés pour le dance-floor sur un deuxième album pop et raï.

TROIS ANS APRÈS LE LUMINEUX “MUSIQUE DE FRANCE” – FUSION IMPROBABLE MAIS RÉUSSIE entre la transe de la techno, l’énergie de l’acid music et les mélodies arabes les plus festives –, lorsqu’on dit aux membres d’Acid Arab que Jdid, leur nouvel album, semble plus structuré, dance-floor, et banger en fait, les deux protagonis­tes à la base du projet acquiescen­t sans broncher. “C’est une bonne définition”, approuve le taiseux et mordant Guido Minisky pendant qu’Hervé Carvalho surenchéri­t : “Il est certain qu’on était plus sûrs de nous, sur la démarche comme sur le résultat, on a aussi essayé d’éviter les pièges dans lesquels on a pu tomber auparavant. Jdid a une coloration clairement raï, et c’est vraiment Kenzi, notre clavier algérien, qui nous l’a apportée, comme beaucoup des invités qu’on croise sur ce disque. C’est pour cela qu’on arrive à quelque chose de plus décomplexé par rapport à nos débuts où on essayait des rythmiques plus élaborées pour ressembler à quelque chose d’oriental ou qu’on imaginait oriental. Là, c’est plus direct et brut.”

Né d’un gag, une soirée chez Moune où Hervé et Guido mélangeaie­nt musiques orientales et electro, le projet Acid Arab va vite dépasser ses ambitions timides en signant sur Crammed Discs (label qui a toujours fait du choc des cultures sa ligne directrice), s’étoffant musicaleme­nt de deux producteur­s de studio, Pierrot Casanova et Nicolas Borne, et d’un clavier algérien, Kenzi, longtemps aux côtés de Rachid Taha. En résultera Musique de France (2016) – clin d’oeil et fusion festive entre des mondes pas si éloignés que ça –, qui a surpris tout le monde par le succès et l’accueil hors norme reçus.

Après une tournée longue comme le bras qui les a conduits dans plus de cinquante pays, tout en sortant du circuit typique de la culture techno, les membres d’Acid Arab ont gardé leur enthousias­me intact. “On peut se retrouver bookés en Croatie dans un festival culturel local avec des danseuses folkloriqu­es, ajoute Guido, puis dans un hôtel cinq étoiles, et ensuite dans une pizzeria. Que ce soit en live ou en DJ set, on n’est jamais soûlés parce que ce n’est jamais pareil. Il y a des pays et des festivals dans lesquels on est considérés comme hype, certains où on est personne, d’autres des ovnis par rapport au reste de la programmat­ion.”

Pour Jdid, mot arabe passé dans le vocabulair­e français et synonyme de nouveau, Acid Arab a repeint ses production­s aux couleurs du raï, genre musical qui a fait danser les années 1980 françaises branchées sono mondiale. “On avait envie d’un album qui s’accorde mieux avec nos sets de DJ, explique Hervé ; autant on a adoré défendre Musique de France en live, autant il y avait peu de morceaux qu’on pouvait jouer dans nos mixes et c’était assez frustrant. On a essayé de garder l’essence du son Acid Arab, mais en plus carré et dansant, avec une forte inspiratio­n raï, apportée par Kenzi.” “Le raï a aussi une dimension pop, un côté chanson, à laquelle on peut immédiatem­ent souscrire, ajoute Guido, c’est une musique qui a explosé dans les années 1980 et qui fait partie des racines métissées de la France. Même si ce qui nous fait le plus plaisir dans le succès d’Acid Arab, c’est que c’est presque devenu un nouveau style de musique, l’acid arab est désormais un genre en soi, et c’était clairement notre objectif de départ !”

Album Jdid (Crammed Discs/ L’Autre Distributi­on)

Concert Le 7 décembre, Rennes (Trans Musicales), le 31 janvier, Paris (Elysée Montmartre)

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