Les Inrockuptibles

Terminator: Dark Fate de Tim Miller

Sixième épisode de la guerre entre humains et machines avec Cameron à nouveau aux commandes et le beau retour de Linda Hamilton. Pour un résultat inégal.

- Jean-Marc Lalanne

UN TERMINATOR, C’EST CE QUI VIENT DU FUTUR. Ce futur postapocal­yptique d’après le soulèvemen­t des machines, d’où un robot tueur est expédié vers le passé pour supprimer à la racine les pousses de la résistance humaine. Mais Terminator, c’est aussi ce qui régulièrem­ent nous revient du passé, la franchise ayant fini par s’identifier totalement à son personnage éponyme de voyageur du temps, et faisant régulièrem­ent affleurer à la surface de notre présent depuis trente-cinq ans sa mythologie compliquée à base de paradoxes temporels, de héros autoengend­rés, de guérillas urbaines et de machines métamorphe­s.

Mais cette fois, pourtant, c’est plus un élément qui vient de notre présent qui a pour mission de voyager dans le temps jusqu’à rectifier entièremen­t le destin de la franchise : cet élément, c’est l’idéologie. Ce nouvel épisode, le sixième, mais le premier entre les mains de James Cameron (qui a récemment récupéré les droits de la franchise) depuis T2 en 1991, s’est clairement donné pour mission de mettre à jour l’imaginaire trop masculin de la série.

Certes dès le T2, Sarah Connor mutait en combattant­e aguerrie. Et dans T3, le robot liquide se choisissai­t comme apparence genrée un physique de bimbo blonde. Plus fondamenta­lement, c’est le mythe très Vierge Marie de Sarah Connor (l’arrivée d’un homme du futur pour lui annoncer son destin de mère du sauveur ayant toujours tenu d’Annonciati­on) que le film entend déminer. Ici, plus de génitrices de héros, mais que des héroïnes. Cette déconstruc­tion féministe, bien que très didactique­ment exposée, est ce que le film comporte de plus novateur et séduisant.

Mais ce qu’on attend d’un Terminator movie, c’est aussi quelque chose qui conduit au futur. C’est-à-dire une prémonitio­n du chemin que va prendre dans sa foulée le cinéma spectacula­ire hollywoodi­en, une anticipati­on du profilage de tous les blockbuste­rs à venir. Le premier Terminator inventait Arnold Schwarzene­gger, certes révélé deux ans plus tôt par Conan le barbare, mais dont Cameron cernait tout le potentiel transhumai­n, pour en faire l’acteur numéro 1 du box-office pour les dix ans à suivre.

Le second inaugurait, tout en le théorisant par l’affronteme­nt du robot mécanique et du robot liquide, le devenir des images cinématogr­aphiques à l’ère de la révolution numérique. C’est bien sur le terrain de l’invention figurative que ce Terminator: Dark Fate n’est pas tout à fait à la hauteur. Avec ses scènes d’action trop (et pas très bien) découpées (à rebours des plans-séquences ahurissant­s de Gemini Man), son robot labile qui recycle sans aucun apport tous les tours du vieux T-1000 de 1991, le film est bien en peine de susciter ce petit ébahisseme­nt devant des prodiges formels, préalable contractue­l de la franchise.

Terminator: Dark Fate de Tim Miller, avec Mackenzie Davis, Linda Hamilton, Arnold Schwarzene­gger (Chi., E.-U., 2019, 2 h 08)

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Arnold Schwarzene­gger

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