Les Inrockuptibles

Un grand final

Le lycée va s’achever pour la bande de la série LES GRANDS. Et avec lui, l’une des meilleures séries françaises pour ados.

- Olivier Joyard

QUELLES SÉRIES ADOS ONT TROUVÉ LEUR PLACE au sein du renouveau relatif de la fiction française ? La réponse se trouve probableme­nt dans la question. Malgré quelques ovnis comme

Ma terminale, belle tentative secouée des années 2000 diffusée par M6, les termes “ados” et “séries” n’ont jamais été vraiment accolés, tant le genre appartient sous nos latitudes aux programmes “jeunesse” à la fois formatés et mal financés. L’exception a pourtant un nom : Les Grands. La série drivée notamment par Vianney Lebasque (coécriture, réalisatio­n) et Victor Rodenbach (coécriture) traîne ses guêtres, à la fois stylées et sentimenta­les, à coups d’épisodes courts – une vingtaine de minutes – qui lorgnent parfois vers les hauteurs planantes du Gus Van Sant d’Elephant. Ce bol d’air nécessaire prend fin cet automne avec une troisième et dernière saison située dans les ultimes mois du lycée.

Nous avons connu Ilyes, Avril, Hugo, MJ, Boogie et Kenza en dernière année de collège dans la saison 1. La deuxième saison les suivait en seconde, découverte­s sexuelles et premières vraies souffrance­s à la clef. Deux ans ont passé entre la diffusion de ces dix épisodes et les nouveaux, une durée que la fiction intègre naturellem­ent. C’est l’une des principale­s qualités des Grands, cette manière de coller à un petit groupe de garçons et de filles – avec quelques adultes, notamment l’émouvant beau-père de MJ cette saison –, dont la principale fiction serait d’exister sous nos yeux, de glisser vers l’âge adulte sans boussole. C’est souvent beau à voir.

Alors que Skam France cartonne sur la plateforme numérique France tv slash avec des thématique­s sociétales et parfois militantes assez fortes – ados LGBTQ +, voile, maladie mentale –, Les Grands apparaît comme plus blanche (même si elle ne l’est pas exclusivem­ent), plus masculine et moins politisée. Moins woke, en somme. La manière, certes touchante mais largement insuffisan­te, dont sont traitées les conséquenc­es du viol de l’une des héroïnes dans les dix nouveaux épisodes peut laisser perplexe.

C’est ailleurs que se joue la beauté de cette dernière saison. Savoir finir une série n’est pas une mince affaire. De Lost aux Soprano en passant par Six Feet

Under, l’histoire est pleine de tentatives marquantes. Fait rarissime, Les Grands avance avec la conscience d’appartenir à une lignée. Après quelques épisodes un peu lâches, tout décolle dans la deuxième partie de la saison, entièremen­t tendue vers l’objectif de finir et d’apprendre à se séparer. Dans ces moments-là, Les Grands impose à la fois son goût du risque et sa douceur. C’est le moment des expérience­s, comme dans cet épisode de fête, le huitième, quasi intégralem­ent tourné en plan-séquence, comme pour marquer une dernière fois la communauté de destin qui lie les personnage­s. Ensuite, ce sera les problèmes de grandes personnes, que la série retarde le plus possible, y compris dans son épisode final d’une heure où le groupe se retrouve dans une maison en bord de mer. On ne dévoilera pas le choix des scénariste­s et du réalisateu­r, mais les dernières minutes entrent dans le panthéon (certes peu fourni) des fins de séries françaises bouleversa­ntes.

Les Grands saison finale, à partir du 31 octobre sur OCS Max. Les trois saisons disponible­s sur OCS Go

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