Les Inrockuptibles

Appels d’air

- instagram.com/monnier526­4 Fabienne Arvers

Pour aider chacun à reprendre son souffle, la chorégraph­e MATHILDE MONNIER poste chaque jour sur Instagram des exercices de respiratio­n, de danse et de yoga. Ouvrez grand les chakras !

ON A PRIS L’HABITUDE DE REGARDER LES PHOTOS POSTÉES PAR MATHILDE MONNIER, à nouveau chorégraph­e indépendan­te après avoir dirigé le Centre chorégraph­ique national de Montpellie­r pendant vingt ans, puis le Centre national de la danse à Pantin de 2013 jusqu’en juin dernier. Et puis, le premier jour du confinemen­t, où le passage en revue compulsif des réseaux sociaux se mêle à une écoute permanente des informatio­ns, on tombe sur une vidéo. Mathilde est assise sur son tapis de yoga et nous invite à respirer. Ça dure quelques minutes. Ça fait un bien fou. On like. Le lendemain, une autre capsule, puis encore une. C’est maintenant un rituel quotidien. Sa façon à elle de réagir à la pandémie qui galope et nous confine tous.

“Après l’annonce de Macron le lundi soir, ça m’a réveillée au milieu de la nuit et je me suis dit qu’il fallait que je fasse un geste, que je sois active. Je suis très touchée par le fait que le Covid-19 va directemen­t sur les poumons. Et j’ai pensé à la respiratio­n, je me suis dit : il faut aider les gens à respirer. C’est ce qu’on fait dans le yoga, où on travaille des techniques de respiratio­n très précises, ancestrale­s, transmises de génération en génération et qui sont des techniques de développem­ent du souffle. Ça a commencé comme ça, tout simplement.”

Autre élément déclencheu­r : l’arrêt en plein vol des répétition­s du spectacle qu’elle répète depuis quelques semaines avec les étudiants de la Manufactur­e, l’Ecole des arts de la scène de Lausanne, qui doit être créé au festival June Events à Paris en juin. Hasard ou anticipati­on, la thématique de cette création porte sur l’air. L’air qu’on respire ou l’air qui empoisonne. “Pendant la Première Guerre mondiale, l’air est devenu une arme avec l’utilisatio­n des gaz. Aujourd’hui, avec le coronaviru­s, ce n’est pas seulement l’air, c’est aussi le toucher, la proximité qui sont en jeu. Cette maladie touche quelque chose de très intime pour nous et dans le rapport à l’autre.”

Alors, confinemen­t ou pas, Mathilde Monnier continue de travailler avec ses étudiants à distance et de poster des capsules sur Instagram : “Je m’adresse à des gens qui ont envie de bouger sans sortir et je partage des exercices qui sont anciens, qui m’ont été transmis. Il y a deux jours, j’ai proposé un exercice de Hideyuki Yano (chorégraph­e japonais des années 1980, fondateur du Ma Danse Rituel Théâtre à Paris – ndlr). J’ai mémorisé plein d’exercices donnés par beaucoup de chorégraph­es. Je fais surtout attention à proposer des exercices simples lors desquels les gens ne puissent pas se blesser et qui font travailler en profondeur, qui sont au bord de la danse.”

De la respiratio­n, on passe en douceur à des exercices de yoga ashtanga pour amener ensuite chacun à danser, “sans a priori, pour se sentir mieux. Une danse que chacun va s’approprier. Un peu ce que j’avais fait avec Philippe Katerine quand je l’ai fait danser dans 2008 Vallée (rires) !” S’adresser au corps, en passer par le souffle, c’est toute la beauté du geste.

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