Les Inrockuptibles

Nuit et brouillard

- Franck Vergeade

Un mois exactement après l’annulation des concerts et festivals liée à l’interdicti­on des rassemblem­ents de plus de 100 personnes en France, le président Emmanuel Macron a douché, lundi 13 avril, les derniers espoirs pour les personnes qui espéraient un retour du spectacle vivant avant l’été :

“Les grands festivals et événements avec un public nombreux ne pourront se tenir au moins jusqu’à mi-juillet prochain.” Dans la filière en particulie­r des musiques actuelles (pop, rock, chanson, electro, rap, jazz), le trou noir se prolonge encore trois mois pour les artistes, musicien·nes, intermitte­nt·es, programmat­eur·trices, producteur·trices et autres bénévoles. “L’année sera plutôt noire que blanche”, comme le résumait Jean-Paul Roland, directeur général des Eurockéenn­es à Belfort, dans les colonnes du Monde. Une situation à laquelle Franck Riester, le ministre de la Culture, a ajouté un épais brouillard, trois jours après les propos présidenti­els, en évoquant la possibilit­é pour les plus petits festivals d’organiser leurs événements à compter du 11 mai.

En sus des pertes financière­s, de l’impact économique et du chômage technique, c’est tout un pan du secteur de la musique qui vacille dans une période printanièr­e et estivale d’ordinaire faste, sinon encombrée pour les festivals. A l’aune de la pandémie du coronaviru­s, c’est aussi la “festivalis­ation de la culture”, pour reprendre l’expression du sociologue Emmanuel Négrier, qui interroge et qui suscitera certaineme­nt une remise en question de la part exponentie­lle accordée aux concerts et aux festivals au détriment des ventes physiques et numériques de disques.

S’il est d’ores et déjà à craindre que les plus petits festivals à la programmat­ion souvent défricheus­e et certaines structures de production disparaiss­ent dans un été meurtrier, on peut saluer quelques premières initiative­s en ces temps confinés. Ainsi, Solidays, qui, malgré l’annulation de son édition 2020, a laissé sa billetteri­e ouverte pour permettre aux gens d’aider financière­ment l’associatio­n Solidarité Sida et inciter les festivalie­rs déjà munis de leur billet à ne pas se faire rembourser.

De son côté, le célèbre Printemps de Bourges, premier des grands festivals à avoir renoncé en applicatio­n des décisions gouverneme­ntales d’avant le confinemen­t, organise, du 21 au 26 avril, un Printemps imaginaire où “les artistes et les festivalie­rs réinventer­ont collective­ment leur édition volée au travers de créations originales”. De quoi entretenir la flamme et l’espoir pour partager à nouveau, collective­ment et sans distanciat­ion sociale, l’essence et la ferveur des concerts.

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Fin du festival de l’île de Wight le 31 août 1970
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