Les Inrockuptibles

Mignonnes de Maïmouna Doucouré

Avec Fathia Youssouf, Médina El Aidi-Azouni, Esther Gohourou (Fr., 2019, 1 h 35)

- M. D.

Un premier long métrage délicat en forme de récit d’apprentiss­age autour d’une bande de filles.

Avant Mignonnes, il y a Maman(s), deuxième court de Maïmouna Doucouré, primé en 2017 aux César lors d’une cérémonie marquée par le poignant discours de son autrice, jeune femme noire qui, sur scène, appelait le cinéma français à une pluralité des regards.

Avec Mignonnes, premier long métrage, Maïmouna Doucouré poursuit cette quête – c’est forcément un enjeu, mais en aucun cas un argument, tant le tirailleme­nt dépeint ici est intime avant d’être social. La cinéaste emprunte la même trame narrative que celle de son précédent film : une petite fille voit son père revenir du Sénégal avec une nouvelle épouse. Dans Mignonnes, Amy, 11 ans, est elle aussi confrontée à cette douloureus­e expérience. Depuis ce point de départ, qui tisse l’arrière-plan du film, la cinéaste ouvre un second récit, celui d’une émancipati­on. Petit animal effrayé avant que la mue n’opère, Amy s’arrache à son milieu

(la famille et ses traditions) et comme à elle-même, en intégrant le gang des “Mignonnes”, reines de la cour de récré et danseuses en herbe ayant trouvé dans l’exhibition d’une féminité débridée leur bouclier de combat. S’emparer d’atours sexy (short, paillettes et poses langoureus­es), est-ce s’affranchir ? Le film a l’intelligen­ce de n’apporter aucune réponse stricte et observe avec un oeil subtil les tergiversa­tions de son héroïne. Cette dialectiqu­e est la qualité de Mignonnes, mais c’est aussi ce qui l’empêche de se délester de son scénario, rendu ici trop lisible au détriment du pouvoir d’incarnatio­n des images. Gageons tout de même qu’il signe les débuts d’une carrière prometteus­e.

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