Les Inrockuptibles

La Femme des steppes, le Flic et l’OEuf de Quan’an Wang

Avec Dulamjav Enkhtaivan, Aorigeletu (Mong., Chi., 2019, 1 h 40)

- Marilou Duponchel

Sur fond d’enquête policière, une envoûtante traversée du désert mongol.

Le film s’ouvre sur une scène de crime. Le corps nu d’une femme gît au milieu des hautes herbes, quelque part en Mongolie. L’enquête débute à peine, mais on la sait déjà subsidiair­e, comme dans ces faux polars avec des flics nigauds et de plates intrigues. L’affaire sera résolue, mais vaut surtout pour symbole (il s’agit d’un féminicide et le film porte, en creux, la violence faite aux femmes) et joue un rôle d’entremette­use entre un jeune policier, chargé de veiller sur la dépouille, et une bergère, seule et armée, embauchée pour protéger la morte et le vivant. Subsidiair­e, car le septième long métrage de Quan’an Wang n’est pas tourné vers la résolution de l’énigme mais vers ces êtres perdus dans la steppe. Il n’existe que pour filmer leurs rencontres et leurs rondes solitaires. Les paysages arides sont capturés dans de longs tableaux statiques, feuilleté d’images envoûtante­s saisissant les couleurs du temps, le doré du soleil, l’horizon rosé d’une journée qui s’achève. Les bouts d’histoires ramassées finissent par former des repères dans cette traversée du désert qui se veut aussi comme une traversée de vie (de la naissance à la mort).Avec son titre de conte farfelu, on imaginait La Femme des steppes, le Flic et l’OEuf farceur. Le film n’est pas en manque d’une certaine substance burlesque, mais elle est diffuse et paraît ici presque gadget. C’est quand il devient un pur objet de contemplat­ion qu’il irrigue son étrange beauté de western tranquille.

Newspapers in French

Newspapers from France