Les Inrockuptibles

Zone de confort

Dénuée de toute zone d’ombre, la deuxième saison de La Quatrième Dimension s’enlise dans une mécanique prévisible.

- A. B.

QU’EST-CE QUE C’EST, ENTRER DANS LA QUATRIÈME DIMENSION ? A la traduction française qui nous évoque un modèle mathématiq­ue difficilem­ent préhensibl­e, on préférera le Twilight Zone originel, espace crépuscula­ire dans lequel les sens se dissolvent, frontière poreuse entre le réel et l’imaginaire où l’on se perd

– pour parfois mieux se trouver ?

Créé par Rod Serling en 1959, le programme s’offrait comme une anthologie d’histoires fantastiqu­es prenant un malin plaisir à surprendre le·la spectateur·trice au fil de retourneme­nts torves. Teintée d’étrangeté et de paranoïa, la collection sondait en creux les angoisses de l’Amérique des 60’s.

C’est à Marco Ramirez qu’a été confiée la tâche d’en frotter la sève surnaturel­le aux traits saillants de notre époque. Constituée en grande partie de remakes d’épisodes cultes, la première saison nous avait séduit·es par sa réalisatio­n et son ambiance soignées mais peinait à en réactualis­er les motifs. On pouvait néanmoins se réjouir de l’effort mené en termes de représenta­tion, à travers un casting embrassant la diversité de la société américaine.

Cette question de la représenta­tion sous-tend d’ailleurs la majorité des récits de la saison 2. D’une gérante d’hôtel qui prend conscience de n’être qu’un avatar au sein d’une simulation à une chanteuse tombant en possession d’un médaillon lui assurant la ferveur du public, les scénariste­s décortique­nt la tyrannie des apparences et auscultent le fossé entre le rôle auquel les personnage­s sont assignés et celui qu’ils auraient aimé jouer.

Quelle tristesse de voir les différent·es réalisateu­r·trices investir cette béance par une collection de vignettes esthétisan­tes, en comprimer le vertige dans une mécanique punitive, préférer le confort d’un fantastiqu­e codifié au trouble d’une narration entre chien et loup. Le plaisir de La Quatrième Dimension ne réside pourtant ni dans la grisaille du réel ni dans son affranchis­sement surnaturel, mais dans le glissement impercepti­ble qui mène de l’un à l’autre. Difficile de perdre l’équilibre quand on avance en pleine lumière.

La Quatrième Dimension saison 2 sur Canal+

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