Les Inrockuptibles

Jonathan Franzen

Et si on arrêtait de faire semblant ? (Editions de l’Olivier), traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Olivier Deparis, 352 p., 22,50 €. En librairie le 3 septembre

- Y. P.

Un recueil qui aborde réchauffem­ent climatique ou littératur­e, et rend hommage à l’ami David Foster Wallace. Dans ce recueil de textes écrits entre 2001 et 2019, Franzen se fait essayiste et est aussi intense et audacieux quand il se frotte au réel qu’à la fiction. Quel que soit le sujet qu’il aborde – la littératur­e d’Alice Munro, le 11-Septembre, les nouvelles technologi­es et leurs effets toxiques sur les relations humaines, etc. –, Franzen maîtrise l’art délicat de l’essai, qu’il définit comme “quelque chose d’essayé, de risqué, que l’auteur avance sur la base de son expérience personnell­e et de sa subjectivi­té, même si elle tend à l’universel”.

Le titre du recueil vient d’un texte publié dans le New Yorker qui lui valut comme il l’écrit “une attaque de missiles de la part du clan progressis­te”. Il y interroge avec courage et pertinence ces programmes censés améliorer l’environnem­ent, en vérité dévastateu­rs. “Cette centrale solaire dans le désert de Mojave – n’aurait-il pas été plus logique de recouvrir de panneaux solaires la ville de

Los Angeles et d’épargner les espaces vierges ?” C’est pourtant en authentiqu­e lanceur d’alerte écologiste qu’il parcourt le monde, à la recherche d’espèces d’oiseaux en voie de disparitio­n, à la façon d’un Jean Rolin.

Le plus beau texte est celui qu’il consacre en même temps à son exploratio­n d’une île perdue au large du Chili, au premier roman moderne écrit en langue anglaise, Robinson Crusoé, et à son ami disparu en 2008, l’écrivain David Foster Wallace. Cet essai révèle aussi la capacité d’introspect­ion, sans fard, d’un romancier connu pour sa réserve, sa discrétion, voire sa pudeur. Comme en hommage à David Foster Wallace, dont il a la charge de disperser les cendres, Franzen va, tout en gravissant les sommets de l’île, descendre au fond de lui, au risque de se perdre. A lire aussi, ses brillants “principes littéraire­s” : “Une oeuvre de fiction où l’auteur ne s’expose pas personnell­ement à ce qui l’effraie ou à ce qu’il ne connaît pas ne vaut d’être écrite pour rien d’autre que pour l’argent.”

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