Survivre à l’amour

L’écriture collective des

Femmes de Barbe-Bleue raconte de l’intérieur les vies brisées des victimes de féminicides.

Mordues de théâtre qu’elles pratiquaient en amatrices, les actrices des Femmes de Barbe-Bleue,

un spectacle écrit collectivement et mis en scène par Lisa Guez, ont remporté le prix Impatience en 2019. Elles devaient jouer au Festival d’Avignon, annulé en 2020, tourner dans les théâtres partenaires du prix Impatience – bref, se lancer dans la professionnalisation de leur passion théâtrale. Las, le Covid-19 a mis à terre la tournée prévue la saison dernière et sape, jour après jour, les dates de 2021. Un comble pour un récit dont le coeur est vécu, de façon exponentielle, par nombre de femmes, confinement et violences familiales et conjugales faisant hélas bon ménage.

D’où la puissance de cette parole, entendue au Centquatre à Paris où elles étaient programmées fin janvier. Il y a d’abord l’introduction, dans laquelle une jeune femme vêtue de rouge raconte la tentation, irrésistible, d’ouvrir cette porte dont le mari lui donne la clé tout en lui interdisant d’en faire usage. Puis, à la façon d’un club de paroles, elles revivent ensemble l’enchaînement des mécanismes qui isolent et rendent vulnérable. C’est le mystère et la clé de cette fable : interdire pour mieux punir. Refuser le choix de l’autre. Poser des règles qui annulent son désir. En cas de transgression, en faire payer le prix fort par la violence et la mort. En posant des mots sur les vagues d’émotions et de sensations qui les ont empêchées de se protéger, Les Femmes de Barbe-Bleue oppose l’écoute et la solidarité à la réclusion induite par la violence. Cathartique et nécessaire.

Les Femmes de Barbe-Bleue mise en scène Lisa Guez, avec Valentine Bellone, Anne Knosp, Valentine Krasnochok, Nelly Latour et Jordane Soudre. En tournée de mars à novembre 2021 – dates à préciser