Les Inrockuptibles

Entretien avec Roschdy Zem

- TEXTE Bruno Deruisseau & Jean-Marc Lalanne

Depuis ses tout débuts dans les années 1990, ROSCHDY ZEM est devenu une figure centrale, épousant l’évolution de la société et celle du cinéma français. A la tête d’une filmograph­ie impression­nante comme acteur, réalisateu­r et scénariste, et alors qu’il tourne son sixième long métrage, il présidera la prochaine cérémonie des César. Rencontre avec un artiste exigeant et populaire.

Dans quelques jours, tu vas présider la cérémonie des César. Et il y a un peu plus d’un an, tu interpréta­is le président de la France dans la série de Rebecca Zlotowski et Sabri Louatah, Les Sauvages. La fonction présidenti­elle semble te coller à la peau. Tu t’y sens bien ?

Roschdy Zem — Ha ha ! Finalement oui ! Le fait est que je me retrouve à une place que je n’aurais jamais pu occuper au début de ma carrière, même dans mes rêves les plus fous. Ce qui m’amène à pouvoir occuper cette place, c’est une évolution du cinéma, une évolution de la France, qui a pris peut-être vingt-cinq ans, mais qui a finalement été plus rapide que je ne le pensais.

Qu’est-ce qui te paraît le plus incroyable : ta réussite profession­nelle qui te permet de présider une soirée des César ou le fait qu’une fiction française aujourd’hui puisse naturellem­ent imaginer un président de la République issu de l’immigratio­n ?

Les deux bien sûr. Quand j’ai commencé ce métier, je n’imaginais pas qu’une carrière était possible pour un enfant de l’immigratio­n. Je pensais vraiment que mon existence était provisoire dans cette industrie. Les rôles pour les acteurs nord-africains se limitaient à des personnage­s secondaire­s de dealers ou de voyous. Je pensais qu’on allait se lasser de moi pour me remplacer par un autre acteur issu de l’immigratio­n, qui jouerait à son tour les rôles de dealers ou de voyous. Ou que moi-même j’allais me lasser de ce type de stéréotype­s.

Quand tu étais enfant puis adolescent, est-ce que l’absence de représenta­tivité du cinéma français te choquait ?

Non, bien sûr. C’était tout à fait accepté qu’un Nord-Africain n’existe pas au cinéma. Ça ne me choquait pas. Un acteur était forcément blanc. Et beau aussi. Comme Alain Delon. Il y a eu de très rares exceptions, et souvent pour des rôles de victimes. Comme par exemple dans Elise ou la vraie vie, un film sur le racisme de Michel Drach [1970] dont le rôle principal est tenu par l’acteur algérien Mohamed Chouikh. Je me souviens que le lendemain de la diffusion télé, on ne parlait que de ça dans mon entourage : tout à coup, un homme d’origine nord-africaine était au centre d’un film vu par tous.

As-tu eu à ton tour des retours de gens qui se sont sentis représenté­s en te voyant jouer le président de la France dans la série Les Sauvages ?

Oui, bien sûr. Longtemps, un Président d’origine nordafrica­ine, c’était inimaginab­le car il n’y avait même pas de maires d’origine nord-africaine. Et puis, aux dernières élections municipale­s, il y a eu l’élection du maire de Saint-Ouen [Karim Bouamrane], du maire de Trappes [Ali Rabeh]… L’évolution de la société est réelle. Je vais prendre un exemple plus personnel. Lorsque j’interprète, dans le dernier film de Pierre Jolivet

[ Les Hommes du feu, 2017], un pompier qui s’appelle Philippe, je m’attends, en allant présenter le film dans des avant-premières publiques, à ce que les spectateur­s me parlent du fait que je porte un prénom de Français en étant d’origine maghrébine. Et en fait,

pas une question n’a porté là-dessus. Quelque chose est déjà accepté dans l’inconscien­t du public. Ce sont les représenta­tions qui ont un petit train de retard sur la société. Les artistes doivent rester alertes pour ne pas se laisser distancer.

A quel moment le cinéma a commencé à t’importer comme forme artistique ?

J’appartiens à une génération qui a grandi avec seulement trois chaînes de télé, avec des ciné-clubs sur plusieurs chaînes en seconde partie de soirée. J’avais déjà vu Hôtel des Amériques [1981] quand j’ai rencontré Téchiné, sauf que je ne mettais pas un nom sur le metteur en scène : je n’identifiai­s que Deneuve et Dewaere. J’avais aussi vu des Pialat, des Sautet, des Chabrol, des Truffaut… C’étaient des films qu’on regardait en famille et, le lendemain, tout le monde en parlait au collège. Donc tous les gens de ma génération étaient un peu cinéphiles, même sans le savoir. Le cinéma, même le plus exigeant, circulait très largement dans toutes les couches de la société.

Jeune homme, tu travailles aux puces de Saint-Ouen. Qu’est-ce qui te pousse à passer des castings pour décrocher des petits rôles ?

Aux Puces, je bosse dans une section particuliè­re : les fripes. J’y suis confronté très vite à des profession­nels du cinéma, des costumiers, des assistants réalisatio­n… Là, des rencontres se font, on sympathise. Il y a d’abord eu un directeur de casting, Gérard Moulévrier, qui a tout fait pour me faire travailler mais

“C’était tout à fait accepté qu’un Nord-Africain n’existe pas au cinéma. Ça ne me choquait pas. Un acteur était forcément blanc. Et beau aussi. Comme Alain Delon”

n’y est jamais arrivé. Il m’a fait rencontrer Coline Serreau, Bertrand Blier, en me poussant à fond, mais ça a toujours échoué ! Il croyait en moi sans que je n’aie jamais rien fait. Il trouvait que j’avais un truc physiqueme­nt…

Au-delà de ce charisme, tu n’étais pas inquiet de ne pas arriver à jouer ?

Je n’étais pas sûr du tout de savoir le faire, mais je n’avais pas froid aux yeux ! Je me disais que c’était une expérience à vivre, et avoir une cassette VHS de ce moment que je garderais à vie m’aurait suffi. Quand, dans le premier film que je tourne avec Téchiné [ J’embrasse pas, 1991], je joue face à Noiret, je me retrouve comme face à un écran, à répondre à une voix qui m’est familière depuis l’enfance, et ça me rend déjà très heureux, même si ça s’arrête après ça. Au moins, je l’aurais fait. Et d’ailleurs, après, je ne fais plus rien pendant deux ans. Je retourne aux Puces.

Ta carrière démarre vraiment quelques années plus tard, lorsque tu rencontres une génération de cinéastes de ton âge, Xavier Beauvois (N’oublie pas que tu vas mourir), Laetitia Masson (A vendre)…

Oui, j’ai d’abord intéressé le cinéma d’auteur, et plutôt des auteurs de mon âge. Je ne l’ai pas choisi. Ça m’a situé à un certain endroit de l’échiquier du cinéma français. Mais la vérité, c’est que j’aurais aussi accepté de tourner dans des comédies potaches si on me l’avait proposé. Ça tient à peu de choses, une histoire d’alignement des étoiles…

Tu es superstiti­eux ?

Ecoute, je dois mon prénom à un grand comédien égyptien, Rochdi Abaza, qui était l’idole de ma mère. Ma mère croyait au destin. Paix à son âme. Mes frères ont des prénoms très courants. Pour elle, tout est lié : le fait qu’elle m’ait appelé Roschdy comme son idole et ma carrière dans le cinéma. Quand j’étais gamin, je lui reprochais de ne pas avoir un prénom plus courant. Personne n’arrivait à le prononcer. J’avais envie de m’appeler

Kamel ou Rachid. Evidemment, tout ce que j’ai pu faire ensuite comme acteur était pour elle un vrai bonheur. Elle est décédée quand j’ai réalisé mon premier film, en 2006, Mauvaise Foi. Moi, je suis assez cartésien. Mais cette histoire de sort jeté par un prénom est assez belle pour qu’on y croie.

Ce déclic qui fait qu’à l’âge de 40 ans tu décides de réaliser des films, tu l’avais anticipé ?

Non, pas du tout. L’écriture me plaisait. Déjà très jeune, j’écrivais des choses sans intention de les exploiter, des pages d’écriture automatiqu­e. Un producteur que je connaissai­s, Philippe Godeau, était fasciné par le fait que moi, enfant de musulmans, je sois en couple avec la mère de mes enfants qui est juive. Je trouvais que ça n’avait rien de particuliè­rement intéressan­t, qu’on vivait des choses très banales. Mais il a insisté et m’est venue l’envie d’écrire là-dessus une comédie, en sortant de mon expérience personnell­e. Il a financé l’écriture. Qu’on me paie pour écrire, c’était une des expérience­s les plus valorisant­es de ma vie. Quand on est arrivé à une version quasi définitive, il m’a proposé de réaliser le scénario moi-même. Je n’avais aucune expérience de mise en scène, mais j’avais envie de raconter cette histoire. J’ai accepté. L’honnêteté, la sincérité du film compensent sa maladresse très technique. Mais il a très bien marché.

C’est ton film le plus personnel, non ? Les autres, comme Chocolat (2016) ou Omar m’a tuer (2011), sont tirés de biographie­s ou de faits divers.

Oui, avec le film que je suis en train de tourner, dans lequel je reviens à un matériau très personnel. Je suis parti d’un événement personnel et familial. Un de mes frères a eu un

“Comme je n’ai pas une nature victimaire, que je suis pudique, je raconte les souffrance­s que j’ai pu subir en les transposan­t dans des formes métaphoriq­ues”

accident cérébral qui a complèteme­nt modifié sa personnali­té. J’en parlais beaucoup à mon entourage, qui m’encouragea­it à écrire là-dessus. J’ai fait appel à Maïwenn pour m’aider. J’ai redécouver­t le plaisir de se raconter, de raconter sa famille. Mais, dans mes films précédents, même s’ils sont tirés d’histoires du passé, j’ai quand même projeté des choses personnell­es. Quand j’ai tourné Bodybuilde­r [en 2014], inspiré d’un documentai­re sur un culturiste, j’ai réalisé pendant le film que j’avais aussi un rapport très spécial à mon corps, la volonté de le martyriser.

De quelle façon ?

Je ne vais pas rentrer dans les détails, mais j’ai eu une période à l’adolescenc­e où je m’automutila­is. En fait, je retrouve des pans de ma vie dans les films sans l’avoir prémédité. Et puis je crois que tous mes films sont guidés par mon goût d’aller vers ceux qui ne me ressemblen­t pas. Ils racontent tous des relations a priori antagonist­es entre des gens qui vont se rapprocher. Dans Chocolat, entre l’Auguste (Omar Sy) et le clown blanc (James Thierrée), c’est évident. Comme je n’ai pas une nature victimaire, que je suis pudique, je raconte les souffrance­s que j’ai pu subir en les transposan­t dans des formes métaphoriq­ues.

Est-ce que dans ta carrière d’acteur tu es capable de situer des caps que tu as franchis ? Parce que tu avais le sentiment de puiser en toi des choses inédites ou que tout à coup on te regardait autrement ?

Clairement, Roubaix d’Arnaud Desplechin [2019] en a été un. A un moment donné, j’avais peur qu’on ne vienne me voir que pour jouer des personnage­s un peu taiseux, marmoréens, des durs… J’ai fait énormément de personnage­s en uniforme – c’est troublant. J’ai été militaire, j’ai fait la guerre [ Indigènes, 2006], j’ai été flic, pompier… Récemment, j’ai refusé un rôle de gendarme. Ça me paraissait redondant.

Dans une comédie comme Chouchou avec Gad Elmaleh, tu prouves que tu peux aussi faire le pitre…

Oui, mais il n’y a pas eu de suite à ça. Mes enfants ont découvert le film récemment et ont été surpris de me voir dans ce rôle délirant de jeune prêtre qui a des visions. Avec Gad, on était en roue libre (rires). Mais ensuite, la comédie populaire n’a pas tellement fait appel à moi. Je crois que l’âge venant je suis davantage capable de montrer ma vulnérabil­ité. Ça prend quelques années pour un petit con comme moi de ne pas vouloir incarner le mâle dans toute sa splendeur et de travailler sur la virilité en montrant ses failles.

Assez jeune, tu as quand même accepté le rôle d’un jeune homme qui se travestit pour se prostituer, dans Changemoi ma vie (2001)…

Oui, mais justement, j’avais peur. J’avais dit à la réalisatri­ce, Liria Bégéja : “OK, mais on ne montre rien !” J’ai refusé une scène où je devais simuler une fellation sur un client. Elle a insisté, m’a promis qu’elle ne filmerait que le visage de mon partenaire. Mais, même suggéré, c’était déjà trop. Je n’ai pas fait la scène.

Aujourd’hui, tu pourrais le faire ou c’est toujours compliqué ?

J’y réfléchira­is en tout cas. Je crois que, quand j’étais jeune, comme la plupart des gars que je fréquentai­s, j’étais inconsciem­ment homophobe. Imaginer qu’un pote était homo, c’était pas envisageab­le. Quand j’ai tourné J’embrasse pas

de Téchiné [1991], mes potes me disaient : “Mais t’es pédé dans le film, frère !” Je disais : “Euh, non, pas du tout.” En fait, oui, un peu ! C’était d’autant plus compliqué que je me rendais compte que je plaisais aux mecs. J’avais du mal à gérer ça. C’était troublant. Mais maintenant, je n’ai plus de problème avec ça. Par ailleurs, je regrette de ne pas avoir tourné à nouveau avec André. C’est un cinéaste que j’admire beaucoup.

Tu as aussi tourné, à tes débuts, avec Patrice Chéreau : c’est un bon souvenir, Ceux qui m’aiment prendront le train (1998) ?

J’étais jeune. Je ne mesurais pas complèteme­nt qui il était. Sur le film, il y avait beaucoup de jeunes comédiens qu’il avait formés au Théâtre des Amandiers, comme Valeria [BruniTedes­chi], Vincent Perez… Je ne les connaissai­s pas, mais je voyais bien qu’ils étaient vraiment une bande. Et là, pareil, je devais jouer une scène de baise avec Perez qui interpréta­it un personnage transgenre. J’ai dit à Chéreau : “No way.” Il a été très délicat : il m’a dit qu’il avait écrit la scène sans vraiment l’intention de la tourner. J’ai appris après qu’il avait les boules !

Est-ce que tu vois que la société a vraiment évolué sur les relations hommes-femmes, sur les questions de genre ? Est-ce que tu le mesures avec tes enfants ?

Ah oui, je vois que je suis un gros ringard. J’ai des discussion­s avec eux où je vois que j’ai une tolérance sur des formes de domination qu’eux n’ont plus du tout. Et c’est eux qui ont raison. En les écoutant, je comprends qu’on entre avec eux dans des changement­s qui sont bénéfiques pour tout le monde. Mais à charge pour nous de prendre le train qui est déjà en marche.

En étant président des César, après les polémiques de l’an dernier et le renouvelle­ment du conseil d’administra­tion, tu incarnes de fait une nouvelle ère.

Oui, et je l’évoquerai dans ma prise de parole en début de cérémonie. On a un héritage à laisser. Il faut laisser l’endroit encore plus propre qu’on ne l’a trouvé. Car il ne l’était pas tellement. J’ai vécu des formes de violence que je n’ai pas envie que mes enfants vivent. Je ne peux pas vous dévoiler mon discours, que je dois encore travailler, mais c’est un message envoyé à la jeunesse.

Cette année cinématogr­aphique, amputée par plusieurs mois de fermeture des salles, tu l’as vécue comment ?

Le premier confinemen­t, je me suis efforcé de le vivre de façon bénéfique. Comme l’occasion d’une réflexion, d’une prise de distance. Avec l’idée que c’était un moment éphémère. Puis la situation s’est installée et, comme beaucoup, j’ai déprimé. Plus le temps passait et plus je recevais des textos anxieux de copains technicien­s, d’acteurs débutants ou qui ne travaillen­t pas beaucoup, qui me demandaien­t si j’avais des plans pour trouver du boulot. On vit un moment très douloureux de paupérisat­ion de beaucoup de gens, qui m’inquiète et m’atteint, même si moi je suis privilégié. Ce moment est difficile, mais il y aura forcément des enseigneme­nts à en tirer. Quand je repense à la cérémonie des César de l’an dernier, par exemple, je me dis qu’on ne soupçonnai­t pas que bientôt, on ne pourrait plus du tout s’embrasser. On est tous partis fâchés et on n’a pas réalisé que pouvoir se serrer dans les bras était un privilège. Ça, c’est une leçon à retenir.

En tant que spectateur, comment as-tu vécu cette année ?

Pendant les mois de réouvertur­e, j’ai découvert le cinéma masqué, et ça m’allait. C’était une belle échappatoi­re. Je ne suis pas du tout amateur de séries, je n’arrive pas à entrer dans ce format. C’est très pénible socialemen­t, parce que les gens vous parlent tout le temps de nouvelles séries, mais je n’y arrive pas. En revanche, à défaut de nouveautés, j’ai beaucoup revu de films anciens. Avec mes enfants, on a regardé des films de Gaspar Noé, dont je ne connaissai­s pas très bien le travail. Ce n’est pas complèteme­nt mon cinéma, mais ses films sont fascinants.

Il y a une radicalité, un souci de l’image vraiment frappants.

Ce serait quoi, ton cinéma ?

Ah ! bonne question ! Sûrement quelque chose de moins hardcore que les films de Gaspar Noé. Mon cinéma est trop divers pour que je puisse le résumer comme ça, mais je recherche une intensité dans des formes plus suggérées. J’aime beaucoup Pialat, chez qui il y a de la violence, qui passe souvent par les mots.

“Ça prend quelques années pour un petit con comme moi de ne pas vouloir incarner le mâle dans toute sa splendeur et de travailler sur la virilité en montrant ses failles”

“J’ai des discussion­s avec mes enfants où je vois que j’ai une tolérance sur des formes de domination qu’eux n’ont plus du tout. Et c’est eux qui ont raison”

Nous avons relu un ancien entretien que tu avais accordé aux Inrocks, il y a seize ans, où tu parlais de L’Esquive, que tu venais de voir, et tu dis quelque chose comme : “Ce Kechiche, il ira loin, c’est un très bon metteur en scène” !

Ouf ! Heureuseme­nt que je n’ai pas dit le contraire ! (rires)

Quand je vois les films de Kechiche ou, d’une autre façon, ceux de Maïwenn, j’ai l’impression qu’ils ont trouvé une forme qui n’est pas reproducti­ble, qui ne marche que parce que c’est eux, qui est une émanation organique de ce qu’ils font.

Tu définirais Arnaud Desplechin comme un cinéaste organique ou cérébral ?

Avant de tourner Roubaix avec lui, j’aurais dit “cérébral” sans doute. Mais, dans le travail, il ne l’est pas du tout. Il vous ramène toujours à des choses concrètes, très factuelles. C’est plutôt moi qui cérébralis­ais mon personnage. Il est très fort pour vous dévoiler la chose la plus évidente que, jusque-là, on ne distinguai­t pas. Mais le plus important est qu’en tournant avec lui, je me sentais regardé comme rarement. Avec une rare intensité. Et je me sentais aimé aussi, ce qui est pour moi la condition idéale pour pouvoir donner le meilleur de moi-même.

Tu disais que tu voulais sortir de ces rôles fondés sur un charisme naturel. Mais, dans Roubaix, tu incarnes un personnage extrêmemen­t robuste, une sorte d’ange gardien…

A une nuance près : c’est un homme extrêmemen­t seul qui cache une souffrance. Daoud [son personnage de commissair­e de police dans Roubaix] n’a rien d’un super-héros. Ou alors le Surfer d’Argent, ce super-héros toujours déprimé, qui a de longs monologues où il exprime ses doutes.

Entre ta compositio­n très appréciée dans Roubaix

pour laquelle tu as eu le César, ton rôle de président dans Les Sauvages, ta présidence des César, tu occupes aujourd’hui une place centrale dans le cinéma français. Comment le ressens-tu ?

J’ai le sentiment très agréable que la patience et le travail ont permis cette reconnaiss­ance. Mais j’ai l’impression que j’ai encore de très belles choses à découvrir. Avec des cinéastes reconnus comme Arnaud Desplechin, mais aussi avec de jeunes réalisateu­rs. Quand Stéphane Demoustier me propose de jouer dans La Fille au bracelet [2019], ça me flatte. On finit toujours par devenir le ringard de quelqu’un, et il faut sans cesse se remettre en question, être attentif à ce qui est nouveau.

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PHOTO Jean-François Robert pour Les Inrockupti­bles
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 ??  ?? Roschdy Zem acteur
1 J’embrasse pas d’André Téchiné (1991)
2 Avec Xavier Beauvois dans N’oublie pas que tu vas mourir de Xavier Beauvois (1995)
3 Ceux qui m’aiment prendront le train de Patrice Chéreau (1998)
4 Avec Nathalie Baye dans Le Petit Lieutenant de Xavier Beauvois (2005)
5 Indigènes de Rachid Bouchareb (2006)
6 Avec Léa Seydoux dans Roubaix, une lumière, d’Arnaud Desplechin (2019)
7 Les Sauvages de Rebecca Zlotowski et Sabri Louatah (2019) 1 2
Roschdy Zem acteur 1 J’embrasse pas d’André Téchiné (1991) 2 Avec Xavier Beauvois dans N’oublie pas que tu vas mourir de Xavier Beauvois (1995) 3 Ceux qui m’aiment prendront le train de Patrice Chéreau (1998) 4 Avec Nathalie Baye dans Le Petit Lieutenant de Xavier Beauvois (2005) 5 Indigènes de Rachid Bouchareb (2006) 6 Avec Léa Seydoux dans Roubaix, une lumière, d’Arnaud Desplechin (2019) 7 Les Sauvages de Rebecca Zlotowski et Sabri Louatah (2019) 1 2
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Roschdy Zem cinéaste Sa première réalisatio­n : Mauvaise Foi ( 2006), avec Cécile de France
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 ??  ?? Sur le tournage de Bodybuilde­r (2014)
Avec James Thierrée et Omar Sy sur le tournage de Chocolat (2016)
Sur le tournage de Bodybuilde­r (2014) Avec James Thierrée et Omar Sy sur le tournage de Chocolat (2016)
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