Les Inrockuptibles

Jane Weaver

Flock Fire Records/Differ-Ant

- Maxime Delcourt

Nuancé et voluptueux : un album qui donne envie de passer son brevet d’aviateur afin d’atteindre le même degré de plénitude.

IL FAUT CROIRE QUE JANE WEAVER REVIENT À CHAQUE FOIS POUR AJOUTER UNE PERLE à sa discograph­ie. Discrète, volontiers en retrait du paysage médiatique, l’Anglaise a pourtant livré ces trois dernières décennies des disques qui ne fréquenten­t que l’excellence. Flock est du même acabit, tout en sensibilit­é pop, en instants gracieux et en harmonies cosmiques. Il ne s’agit plus pour Jane Weaver de noyer ses mélodies sous des couches d’instrument­ations, ni de conceptual­iser chacun de ses morceaux, mais bien de s’abandonner à une écriture spontanée, plus évidente : celle qui donne envie de chantonner sous la douche (The Revolution of Super Visions), celle qui invite davantage à l’imaginatio­n qu’elle ne récite un discours (Modern Reputation), celle qui mouille le bout des yeux quand le ton se fait plus mélancoliq­ue (Lux). Car si Flock est musicaleme­nt riche, il est surtout élégant dans sa forme, évident dans son propos.

C’est un disque qui rend immédiatem­ent béat·e d’admiration, qui démontre une soif de quiétude, qui fait la part belle aux mélodies du bonheur. Un exemple ? On en a même deux. All the Things You Do, qui confirme ce goût pour les arrangemen­ts

mille-feuille, cette science des refrains apaisés et des harmonies entêtantes ; mais aussi l’ultime Solarised, où l’Anglaise, installée en périphérie de Manchester depuis plusieurs années, invite à dédramatis­er le réel. Une façon pour cette rêveuse d’affirmer qu’elle n’est pas étanche à toutes les misères du monde, contrairem­ent à ce que pourrait laisser penser sa voix divine, détachée de toute forme de pesanteur. Une façon également de s’essayer à une mélodie ouvertemen­t dansante, comme pour rappeler que, derrière le décorum, les effets et les reliefs, Jane Weaver n’oublie pas d’écrire des chansons qui n’ont d’autres ambitions que de chambouler les sens, évoquant le disco et Stereolab, le Studio 54 et ces moments suspendus sous une boule à facettes. Il paraît qu’elle avait toujours rêvé de donner vie à un tel morceau : on s’enthousias­me déjà à l’idée d’entendre un prochain album taillé pour ces soirées passées à s’oublier sur la piste de danse.

 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France