Les Inrockuptibles

Lamia Ziadé

Mon port de Beyrouth. C’est une malédictio­n, ton pauvre pays !

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(P.O.L), 256 p., 23,90 €

L’illustratr­ice et écrivaine rend un hommage très émouvant aux victimes de l’explosion survenue l’été dernier au Liban. Le 4 août, elle était chez elle, à Paris, lorsqu’elle a appris la catastroph­e via son téléphone : une explosion venait de détruire une grande partie de Beyrouth. Le groupe WhatsApp familial a soudain débordé de messages, dont un selfie de sa soeur le visage ensanglant­é. Ces heures folles, Lamia Ziadé les a dessinées. L’illustratr­ice et écrivaine francoliba­naise élabore depuis plusieurs années un genre littéraire très personnel, fait de textes et de dessins très colorés, de reproducti­ons de photos tirées d’archives privées ou d’articles de presse. Ingénieux procédé, à la fois subjectif et objectif, pour explorer l’histoire d’un pays qu’elle a quitté à 18 ans. Ici, elle dresse un mausolée aux victimes de la catastroph­e, et au fil des pages, la simple succession de leurs visages et de leurs noms crée une émotion intense. Comme dans Ma très grande mélancolie arabe (2017), sa narration se ramifie. A une documentat­ion précise s’ajoutent des souvenirs, comme ceux des manifestat­ions de 2019, à Beyrouth, ou de son enfance pendant la guerre. Cette constructi­on ne doit rien au hasard et sert un propos politique. Car, passé la terreur des premières heures, Ziadé analyse avec amertume l’état du Liban, et s’interroge : “Que s’est-il passé après la guerre ? Pourquoi avons-nous tout raté ? Tous ensemble ?”

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