L'Histoire

Rocca, officier romantique

Oeuvres Albert Jean Michel Rocca

-

présentées et établies par Stéphanie Genand, Honoré Champion, 2017, 296 p., 32 €. On connaît, ô combien et heureuseme­nt, Mme de Staël. Mais qui se souvient de Mme Rocca, qui est pourtant la même ? C’est en 1811 qu’elle rencontra Albert, dit John Rocca, Genevois de 22 ans plus jeune qu’elle, en 1812 qu’elle en eut un fils, en 1816 qu’elle l’épousa dans le secret le plus total. L’année suivante, elle mourait, celle d’après, c’était lui, à 30 ans. Son coeur, il l’avait voué à deux personnes, sa cité natale, occupée en 1798 puis annexée par les Français, et Germaine de Staël. Son corps, il avait été mutilé en 1809 en Espagne, où, engagé depuis deux ans dans l’armée napoléonie­nne, il avait servi comme lieutenant de hussards, ce qui lui avait valu la Légion d’honneur, après une brève campagne en Prusse. Il en rapporta des Mémoires sur la guerre des Français en Espagne publiés en 1814 avec la participat­ion de sa compagne, qui décrivent dans le détail et d’un ton neutre, sous lequel perce le dégoût, les horreurs de la guerre, surtout lorsqu’elle est menée contre tout un peuple. S’y ajoutent La Campagne de Walcheren, c’est-à-dire la tentative des Anglais contre Anvers en 1809 dont le lieutenant Rocca fut le témoin, et surtout, rédigé dans les derniers mois de sa vie, inachevé et demeuré inédit, Le Mal du pays, fiction très autobiogra­phique où l’auteur dévoile les ressorts qui l’ont conduit à s’engager dans l’armée napoléonie­nne, les ravages causés en Prusse sur les population­s mais aussi en luimême, et sa lente expiration, par la tuberculos­e mais surtout par la mélancolie provoquée par son éloignemen­t et sa trahison envers sa patrie. L’officier romantique, dont les oeuvres sont éditées et présentées avec brio par Stéphanie Genand, était aussi un écrivain méritant de revivre.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France