Marie Sara, candidate muletta
Chaque année, à la même période, ils débarquent avec leurs banderoles et leurs teeshirts rouge sang siglés «No Corrida». Ce samedi, militants et sympathisants du Crac (Comité radicalement anticorrida) vont inonder Alès puis stopper leur cortège à deux pas des arènes, à l’heure où à l’intérieur, les taureaux seront mis à mort. Si les anticorridas concentrent leurs efforts sur cette commune plutôt que sur d’autres bastions taurins comme Nîmes ou Arles, c’est qu’ils l’estiment «prenable» : «Alès est la plus septentrionale, explique Jean-Pierre Garrigues, président du Crac. Législatives oblige, la manifestation sera cette année politisée. Trois candidats investis par le Parti animaliste (lequel présente 147 candidats en France) défileront aux côtés du Crac, dont Hélène Thouy, avocate et coprésidente du Parti animaliste : «L’abolition de la corrida fait partie de notre programme national, mais dans les territoires concernés, l’enjeu est évidemment plus fort. Car contrairement à ce qui est rabâché, même dans ces territoires, l’opposition à la corrida est importante.» Selon un sondage Ifop commandé en mars par l’Alliance anticorrida, 75 % des habitants des dix départements où la corrida est légale se déclarent opposés à la tauromachie avec mise à mort.
Le sujet s’avère particulièrement clivant dans le Gard, comme l’illustre la candidature pour les législatives de Marie Sara. Ancienne torera, actuelle directrice des arènes des Saintes-Mariesde-la-Mer et de Mont-deMarsan, cette médiatique quinquagénaire a obtenu l’investiture de la République en marche (d’Emmanuel Macron himself, dit-on) sur la deuxième circonscription gardoise face au député sortant, Gilbert Collard (Rassemblement bleu Marine). Depuis, plus d’une demidouzaine de pétitions circulent sur Internet contre l’investiture de Marie Sara, réunissant à ce jour près de 168 000 signatures. Des pétitions accompagnées de photos où l’on voit par exemple la torera planter une épée dans la tête d’un animal agonisant. Même le collectif des vétérinaires pour l’abolition de la corrida y va de son couplet: «Marie Sara est surtout connue pour avoir exercé comme rejoneadora, torera à cheval, pendant quinze à vingt ans, jusqu’en 2007. Elle a ainsi charcuté jusqu’à la mort des centaines de taureaux», peut-on lire sur leur site.
L’Alliance anticorrida a elle aussi mobilisé ses troupes : «Entre 1 000 et 2 000 mails dénonçant cette investiture ont été envoyés au Président ainsi qu’à tous les dirigeants d’En marche, affirme Claire Starozinski, présidente de l’association. Pas de quoi troubler le référent gardois d’En marche : «Les anticorridas ont surtout attaqué sur Facebook. Mais personnellement, je n’ai reçu que deux mails d’adhérents qui trouvaient scandaleux ce choix», explique Jérôme Talon. Pour qui le choix d’une ex-torera fera peut-être perdre des voix à la liste En marche, mais la personnalité de Marie Sara pourrait en attirer de nouvelles. Quoi qu’il en soit, le combat qu’elle mènera contre Gilbert Collard ne se jouera pas sur le terrain de la corrida, car lui aussi est considéré comme un aficionado.
S. Fi. (à Montpellier)