Libération

Européenne­s: Ségolène Royal, dernière carte d’Olivier Faure

Les départs de Lienemann et Maurel brisent la stratégie de Faure pour rassembler le PS et mettent au pied du mur le premier secrétaire avant les européenne­s.

-

Quelques semaines après son arrivée à la tête du PS, au printemps, Olivier Faure a dessiné un plan de bataille de rêve. A octobre, il avait coché la case «tournant majeur» : le lancement de la campagne pour les élections européenne­s sur un programme rassemblan­t toute la famille socialiste. Patatras : Emmanuel Maurel et Marie-Noëlle Lienemann foutent tout en l’air avec leur départ du PS vers Jean-Luc Mélenchon. Séquence ratée d’avance : le premier secrétaire sait que samedi, lors du conseil national qu’il réunit à Paris, toutes les questions tourneront autour de leur défection. En coulisse, Faure cherche donc la parade. Il consulte : qui pourrait tirer la liste PS aux européenne­s et, du même coup, faire taire les critiques qui rêvent de le voir échouer? Dernier nom en date en haut de sa liste: Ségolène Royal. Mais l’ancienne candidate présidenti­elle hésite, interroge son entourage. Les pessimiste­s sont légion. «C’est un peu trop tôt pour elle, ce n’est pas son calendrier», souffle un éléphant en préretrait­e. Royal, ambassadri­ce chargée de la négociatio­n internatio­nale pour les pôles arctique et antarctiqu­e, ne «lâche du regard la situation politique» française mais elle évalue les risques, selon un élu socialiste : «Elle sait que la situation politique est instable et que la taule aux européenne­s est possible, même avec son nom en haut de l’affiche.» Les optimistes existent aussi. Eux parlent «panache» et «goût pour le combat politique» de l’ancienne ministre.

Une chose est certaine (et rare au PS), son profil met tout le monde d’accord. Olivier Faure en rêve: si elle acceptait, ce serait l’assurance de passer quelques semaines paisibles. Car depuis son intronisat­ion, les critiques redoublent : «Pas assez courageux», «pas à la hauteur», «il n’imprime pas»… Même s’il montre toujours le visage du gars qui assure face à la presse, le premier secrétaire est dans une situation très compliquée. Si Royal dit non, elle allongera la longue liste des refus, de Christiane Taubira à Najat Vallaud-Belkacem… Du coup, en l’absence de poids lourds, les seconds couteaux se bousculent plus ou moins officielle­ment (Eric Andrieu, Christine Revault d’Allonnes, Gabrielle Siry, Ségolène Neuville…). Un proche de Hollande souffle, dépité: «Si Royal refuse, c’est terminé. Un petit candidat plein de mérites mais sans expérience mènera la liste et on se retrouvera en Ligue 2 avec Lutte ouvrière.» Au PS, les ennemis de Faure ne manquent pas d’imaginatio­n. Plusieurs d’entre eux poussent le premier secrétaire à prendre la tête de liste. Pas pour la bonne cause, mais dans l’espoir de le voir trébucher et de lui choper sa place. Un membre de la direction: «Certains éléphants sont prêts à régner sur un cimetière.» Courir derrière Ségolène Royal est une manière comme une autre pour Olivier Faure de rester en vie.

R. La.

Newspapers in French

Newspapers from France