Libération

Renault en grève à Choisy-le-Roi, ville qui tourne le dos à la gauche

- Frantz Durupt

Cette semaine, Choisy-leRoi, 45000 habitants en plein Val-de-Marne, tournera une page de son histoire : le conseil municipal introniser­a un maire de droite, mettant fin à soixante-quinze ans d’administra­tion communiste dans cette ville symbole de la «ceinture rouge». Tonino Panetta, qui l’a emporté avec 55% des voix face au maire sortant, Didier Guillaume (37,5%), trouvera sur son bureau l’histoire de la ville ouverte à une autre page, sur le point d’être elle aussi tournée : le site historique de Renault, que le constructe­ur gère depuis 1949 et qu’il compte fermer au cours des deux prochaines années.

Il y a un mois que la direction du groupe a annoncé le transfert de son activité à Flins (Yvelines), à 50 kilomètres de là (une heure de route quand ça roule bien, ce qui est rare). Les quelque 260 salariés du site en sont restés «les jambes coupées». Mais ils ne comptent pas se laisser faire. Lundi à l’aube, ils ont installé un piquet de grève pour le signifier à la direction, au moment où se tient un nouveau comité central d’entreprise. «On veut savoir comment ça va se dérouler pour chacun, comment le travail sera transféré. Ils disent “il y aura des négociatio­ns”. Mais on a besoin d’avoir des réponses maintenant», dit Karine Six, la trésorière (FO) du CSE. Le PDG de Renault, Jean-Dominique Senard, a promis à plusieurs reprises de venir. Ils l’attendent.

A l’usine se croisent des ingénieurs à peine trentenair­es et des types qui ont trente ans de maison. Alexandre vient de déménager depuis Renault Villeurban­ne (Rhône) : «J’arrive ici, on me dit “ça ferme”.» A côté de lui, Dominique, à Choisy depuis 1979 et en retraite dans deux ans : «Je voulais sortir par la grande porte, je vais sortir par le côté.» Tous sont intarissab­les sur le «savoir-faire» Choisy. L’usine est spécialisé­e dans l’échange standard, c’est-àdire qu’un moteur usé qui entre ici en ressort presque plus neuf qu’un neuf. Et ce n’est pas comme si les projets manquaient : Alexandre et Dominique travaillen­t sur l’adaptation des moteurs hybrides qui équiperont de futures Clio, Megane et Captur. Bref, personne ne voit bien pourquoi il faudrait fermer Choisy pour demander aux collègues de Flins, qui n’ont pas la même formation, de faire la même chose.

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