De 130 à 110, l’auto à zéro
Le débat sur la réduction de la vitesse à 110 km/h sur autoroute avive la nostalgie des défenseurs d’une liberté pétrolée déjà subclaquante.
Il y a eu ces journées irréelles où les voitures étaient parquées au garage comme des bêtes de somme à l’étable. C’était comme si elles attendaient un Damien Hirst qui les aurait tronçonnées par le milieu pour en montrer les bielles débiles et les rouages inutiles, comme il le fait de la carcasse des braves laitières de réforme. Ces ouvrières du macadam étaient soudain devenues des machines célibataires que personne ne voulait plus matcher sur Tinder. Ces épaves novices cloîtrées en fourrière sanitaire flippaient d’être envoyées rouiller au cimetière marin. Et les matous qui ne pouvaient plus ronronner sur leurs capots tièdes faisaient pattes de velours mélancoliques sur leurs carrosseries griffées. Pendant cette mise au clou de leurs limousines, les chauffeurs sans livrée joggaient en rond sur leurs chaussures pneumatiques dans les rues vidangées de toute humanité carbonée et de toute automobile pensante. Tenus au lasso par la loi du kilomètre, ils cerclaient petit mais parfois se réappropriaient subrepticement les périphériques urbains. Inusité pour le coureur à pied, ce petit pas de clerc était un bond de géant pour le citadin. Lequel remplaçait pour la première fois sur le ring les pétroleuses perpétuellement désherbantes des cités loin d’être reverdies. Depuis, la pétarade a repris et la meilleure amie de l’homme d’avant pensait retrouver une partie des faveurs envolées. L’après-Covid incite au repli dans son habitacle individuel, dans sa coquille de métal, dans sa carapace de tortue monospace. Sauf que ça devient de plus en plus tortueux. Déjà la pandémie a accéléré l’expulsion des bagnoles des métropoles. Voici que l’autoroute entrevoit la banqueroute des as du volant. Si Macron ne reporte pas indéfiniment les re