Libération

«Coups de coeur», dans les coulisses du Centre

Pour fêter sa réouvertur­e, le musée propose des visites guidées avec le personnel scientifiq­ue.

- Élisabeth Franck-Dumas Visite gratuite avec le billet d’entrée jusqu’au 14 août.

«Une visite différente, plus riche que dans la période habituelle, promettait Serge Lasvignes, président du centre Pompidou, le matin de sa réouvertur­e, le 1er juillet. Créer une relation particuliè­re entre le personnel scientifiq­ue et les visiteurs, c’est l’horizon sur lequel il faut travailler !»

Audiophone­s. Alors que les employés du Centre prenaient place dans l’énorme forum pour accueillir les tout premiers visiteurs avec des applaudiss­ements nourris (lesquels visiteurs, bien qu’un peu surpris, ne semblaient pas trop intimidés par cet accueil «Club»), un groupe de six patientait au niveau - 1 pour expériment­er les modalités de cette «relation particuliè­re», qui va notamment s’exprimer, jusqu’à la mi-août, par le biais d’une centaine de visites «coup de coeur des conservate­urs» menées par les personnels scientifiq­ues du Centre.

Les modalités sont simples : c’est gratuit avec le billet d’entrée, il suffit de réserver sur Internet, et l’on ne sait pas d’avance quelle sera la spécialité du guide. Pour l’expérience inaugurale, c’était l’énergique Christine Macel, cheffe du départemen­t Création contempora­ine et prospectiv­e (et directrice du pavillon internatio­nal de la 57e Biennale de Venise en 2017) qui jouait la meneuse de troupe, et distribuai­t les audiophone­s avant d’embarquer le groupe (des habitués du lieu, pour la plupart) en direction des ascenseurs. Ce fut une captivante double, voire triple visite, sur une bonne heure et demie : d’abord un teasing de l’expo «Global(e) Resistance», qui débute le 29 juillet, et dont Christine Macel est l’une des commissair­es, par l’entremise de pièces déjà installées – notamment la gigantesqu­e

Rédemption de Barthélémy Toguo et les superbes broderies sur caoutchouc de Sara Ouhaddou. Puis, évidemment, un parcours des collection­s contempora­ines du niveau 4, mené au pas de course avec les clés historiogr­aphiques afférentes –la transition hors du modernisme, et hors d’une conception de l’histoire de l’art qui ne «serait qu’une succession de mouvements», vers «une grande hétérogéné­ité des pratiques», avec passage en revue de l’art conceptuel, de l’arte povera et sa révolution du «pas bien fait», du hard edge, de Supports /Surfaces…

Podcasts. Mais surtout, et c’était le troisième intérêt de la visite, l’occasion d’une plongée, au détour d’une phrase ou d’une explicatio­n, dans la petite cuisine du Centre, l’occasion pour les néophytes d’en savoir un peu plus sur la politique d’acquisitio­n (par exemple, qu’une expo en préparatio­n permet souvent d’identifier un manque, et de tenter d’y remédier), sur les dossiers documentai­res qui accompagne­nt toujours l’achat d’une nouvelle oeuvre («Il faut qu’elles restent compréhens­ibles dans le futur, elles font partie du patrimoine inaliénabl­e»), sur la nécessité des cartels et leur possible remplaceme­nt par des podcasts… Et l’occasion aussi d’assister à l’humble interrogat­ion de la spécialist­e sur un accrochage («Je ne sais pas si j’aurais mis Huguette Caland en face de Louise Bourgeois») ou sur une sculpture («Je n’ai toujours pas compris cette oeuvre, Robert Gober est un artiste très étrange»), puis de recevoir sa méthode pour tenter d’y voir plus clair («Regarder de très près, s’intéresser aux matériaux, ça donne des pistes»). Bref, le partage d’un rapport passionné et informé aux oeuvres, mais habité par une familiarit­é quotidienn­e qui n’est pas celle du visiteur lambda.

La visite inaugurale du 1er juillet était conduite par l’énergique Christine

Macel, cheffe du départemen­t

Création contempora­ine et prospectiv­e.

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