Libération

Un débat en phrases finales

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«L’INDIVIDU NE PEUT PAS CORRIGER SEUL LA PARESSE POLITIQUE SUR CES QUESTIONS»

«Honnêtemen­t, cette publicité faite à la mort me paraît une mauvaise idée. On est dans une équation mal résolue, car ce n’est pas le sujet qui définit le cadre de sa mort. Il me semble même que cela rajoute au désordre ambiant, plutôt que cela ne l’organise. En écrire, moi ? Une précaution vaut mieux qu’aucune. Si j’étais atteint d’une maladie grave, j’en écrirais. Reste que je ne fais pas le pari juridique comme mode de régulation des conditions collective­s de la mort. On ne peut pas demander à l’individu de corriger seul le poids de la paresse politique collective sur ces questions et sur ces situations. On demande à chacun de résoudre ce que le collectif continue de garder comme impensé. Mais je le redis, si j’étais malade, j’en écrirais, une précaution vaut mieux qu’aucune.»

«LES MÉDECINS ONT UN RÔLE IMPORTANT POUR AIDER LE PATIENT À CLARIFIER CE QU’IL PENSE»

«Avoir rendu les directives anticipées opposables constitue une belle avancée, un vrai pas en avant. Que faire ? Que dire ? Quoi écrire? C’est à chacun de se projeter dans ces cas de figure… Ces directives font référence à des situations bien différente­s. Il y a celles qui sont vraiment anticipées, c’est-à-dire quand la personne se met dans l’hypothèse d’un accident qui la met hors d’état de donner son avis. Il y a le cas où vous êtes malade, vous vous préoccupez de la suite. Pour cette deuxième situation, il y a un enjeu: le malade doit être accompagné dans l’élaboratio­n de ses directives. Les médecins ont un rôle important pour aider le patient à clarifier ce qu’il pense. Pour ma part, je suis comme beaucoup de gens. Dans l’absolu, je sais que ce serait bien de les établir. Et on se dit tous les jours que l’on a toujours le temps. Et puis il y a ce constat : les écrire n’est pas simple. Comme ce n’est pas évident non plus d’en parler, ni de prendre le temps d’en discuter avec les médecins. En tout cas, je ne les ai pas écrites, ou plutôt je ne les ai pas encore écrites.»

«C’EST UN ACTE CITOYEN, CELA FAIT PARTIE DES DROITS DES MALADES»

«Les directives anticipées ne m’apparaisse­nt pas d’une utilité folle. Leur usage dépend de situations assez rares, de situations embarrassa­ntes, complexes, à peine 1 ou 2 % des situations réelles. «Il n’empêche, il est important symbolique­ment qu’elles existent et que l’on puisse en écrire. En France aujourd’hui, à peine 1 % des personnes en ont écrit, alors que dans d’autres pays c’est près de 20 %. Pourquoi ? C’est un acte citoyen, et cela m’agace quand j’entends des médecins dire qu’ils ne veulent pas être contraints par ces directives, cela fait pourtant pleinement partie des droits des malades. Je regrette d’ailleurs qu’elles ne soient pas inscrites dans la carte Vitale, mais dans le dossier médical personnali­sé, dont on ne sait jamais quand il existera.

«Pour ma part, j’en ai écrit. Pour soulager ma famille d’avoir à se poser la question, et qu’elle soit ainsi rassurée sur ce que je souhaite.»

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