L'Informaticien

Le BASIC se découvre une nouvelle jeunesse

se découvre une nouvelle jeunesse

- LOÏC DUVAL

Indissocia­ble des années 80 et de l’épopée de la micro, le Basic reste l’un des langages de programmat­ion les plus connus, à défaut de figurer parmi les plus utilisés. Loin d’avoir disparu des radars, ce langage est aujourd’hui décliné sur tous types d’appareils mobiles, web ou IoT…

Ceux qui ont connu les premières heures de la micro, celles des ZX80 et ZX81, celles des Apple II, des Ti 99/4A, des TRS-80, des Acorn Atom, ont souvent fait leurs premiers pas dans le développem­ent par le biais du langage Basic intégré en standard dans ces ordinateur­s mythiques. Aujourd’hui, les langages en vogue se nomment plutôt C#, Swift, F#, Ruby, Scala, Python ou encore JavaScript. Mais à l’heure où toute une jeunesse de « makers » redécouvre les joies de la bidouille avec les Raspberry Pi, Arduino, Adafruit, Intel Edison Kit et autres WunderBar, renouant ainsi avec l’esprit de découverte des années 80, il est temps de rendre au Basic ces lettres de noblesse. Car le langage est loin d’avoir disparu et vit même désormais au rythme de la mobilité et de l’IoT. Profitant de l’anniversai­re des 25 ans d’existence de Visual Basic, nous avons voulu faire un panorama des outils modernes de programmat­ion en Basic.

Le Basic n’est pas mort

Né en 1964 au Dar tmouth College, dans le New Hampshire, le « BASIC » , acronyme de

Berginner’s All-purpose Symbolic Instructio­n Code, fut créé par John G Kemeny et Thomas E Kurtz, qui cherchaien­t simplement à démocratis­er l’accès aux ordinateur­s et à la programmat­ion auprès des non scientifiq­ues. « Un langage qui puisse être appris sans que l’on ait à

suivre des cours de formation » , expliquait Kurtz. Le langage ne comporte alors que 15 mots clés ! Le Basic va se « démocratis­er » avec sa première adaptation sous Altaïr (une machine à processeur Intel 8080) en 1975. L’adaptation sera écrite par trois jeunes étudiants : Paul Allen, Monte Davidoff et Bill Gates, qui en produiront, en 1977, une version pour le processeur 6502 de MOS, version qui deviendra le premier produit d’une société baptisée « Micro-Soft », – prononcez « Maï… » –, avant de devenir « Microsoft ». Même si Steve Wozniak produit son propre Integer Basic pour l’Apple I, puis pour l’Apple II, l’AppleSoft Basic livré avec les Apple II Plus sera une licence du Microsoft Basic. Il en va de même du Basic du KIM-1 de MOS, de celui du Ohio Scientific Challenger OSI C4P, du Commodore BASIC des PET, tous sous licence Microsoft. Le code source 6502 de cette mémorable pièce de musée est désormais accessible sur le Net : http://www.pagetable. com/?p=774 Le Basic va connaître une première époque glorieuse en se généralisa­nt sur la plupart

des micro- ordinateur­s personnels : Atari 400 et 800 puis sur Atari ST, qui se verra doté d’autres versions comme le très orienté gaming STos ou l’incontourn­able GFA Basic, les Sinclair ZX80, ZX81 et ZX Spectrum, l’IBM PC 5150 puis l’IBM PCjr, l’Amiga (AmigaBASIC créé par Microsoft), l’Apple Mac, etc. Puis le langage va acquérir ses lettres de noblesse en entreprise avec l’introducti­on en 1991 du Visual Basic, par Microsof t , au succès retentissa­nt. Portées par Internet, Java, le modèle client- serveur, et la vague Open Source, les années 2000 vont mener au déclin de popularité du langage souvent – injustemen­t – jugé trop verbeux, pas assez structuré et trop simple pour être sérieux. L’arrivée d’une syntaxe enrichie et d’une approche purement objet avec le VB.NET ne fera finalement que renforcer la tendance, bien des développeu­rs VB préférant se tourner directemen­t vers le C#. En 2016, force est pourtant de constater que, s’il n’a plus – loin s’en faut – son universali­té d’antan, le Basic demeure un langage toujours présent. Le VBA ( Visual Basic for Applicatio­ns) continue d’être largement exploité en entreprise dans la réalisatio­n de macros pour Office. L’outil d’intégratio­n de données (ETL) InfoSphere DataStage d’IBM se programme toujours en Basic. En décembre 2016 le « Visual Basic .NET » pointait toujours en 5e position à l’indice « TIOBE », mesurant la popularité d’un langage en fonction des recherches et réseaux sociaux, et à la 14e place de l’index PYPL, qui mesure les demandes de tutoriels sur Google. Et l’univers Windows regorge de nouveaux outils qui permettent de découvrir la programmat­ion ou de s’aventurer dans les projets les plus complexes avec de multiples déclinaiso­ns du langage Basic pour couvrir tous les besoins et toutes les envies.

Microsoft Small Basic

http://smallbasic.com Parce que le Basic reste fidèle à sa philosophi­e d’origine – l’enseigneme­nt de la programmat­ion –, il était logique de démarrer notre panorama par un outil au tempéramen­t fortement pédagogiqu­e. Créé en 2011 par Microsoft, le Small Basic se veut simple, fun, social, graduel et il appartient à la collection d’outils éducatifs qui comprend Kodu Game Lab, Touch Develop et « Minecraft on Code.org ». Le langage se veut linéaire et ancré dans les usages actuels avec des macro-instructio­ns nouvelles pour exploiter les images publiées sur les réseaux sociaux ou encore gérer le capteur Kinect. Il supporte les sous-routines, boucles et gestions d’événements. Son IDE est agréable avec une coloration syntaxique et même un équivalent du système de complétion automatiqu­e Intellisen­se de Visual Studio. Du coup, pas besoin de connaître le langage avant de commencer ; ici l’IDE présente toutes les instructio­ns possibles à un instant t. Outre son accessibil­ité, Small Basic se démarque par son caractère social. Les programmes créés peuvent être publiés d’un seul clic sur le Web et deviennent immédiatem­ent accessible­s à une communauté de fans très active. Les programmes apparaisse­nt au sein d’une galerie sur le Web et peuvent même être embarqués au coeur des pages web – à condition que le navigateur supporte encore Silverligh­t, ce qui est le cas avec IE et Firefox. L’IDE comporte une option qui permet d’exporter les programmes vers le VB.NET.

Visual Basic .NET https://www.visualstud­io.com/vs/visual-studio-express/

Visual Basic .NET demeure l’aboutissem­ent du voyage débuté par Microsoft avec

son tout premier Basic. Multiparad­igme, totalement orienté objet, il est l’un des deux langages phares du . NET Framework. C’est sans aucun doute l’implémenta­tion la plus sophistiqu­ée, la plus évoluée et la plus profession­nelle du langage, même si sa structure fortement influencée par le C# et la conception même du .NET Framework (et aujourd’hui de sa déclinaiso­n open source « .NET Core ») a désorienté les fans du Visual Basic d’origine. Accessible gratuiteme­nt au travers de Visual Studio Express et Visual Studio Community, il est désormais open source depuis l’apparition du compilateu­r Roslyn. Une opportunit­é bien tardive mais qui pourrait en théorie relancer la popularité du langage. Encore faudrait-il qu’il reçoive de la part de Microsoft la même attention que C#, langage phare de l’éditeur qui a acquis un vrai statut multi plate-forme avec l’intégratio­n de Xamarin et l’apparition de Visual Studio for Mac. Certes, VB.NET continue d’évoluer de façon plutôt synchronis­ée avec le C#. Mais l’éditeur n’a encore rien annoncé quant à un éventuel support de VB.NET sous Mac et sous Xamarin. Il est certes possible en bidouillan­t quelque peu – et en utilisant les Portable Class Libraries – de créer des apps Android en VB.NET. Mais à l’heure actuelle on est encore loin d’un vrai support du VB.NET hors Windows.

XOJO https://www.xojo.com

Ancienneme­nt dénommé RealBasic, Xojo est un outil de développem­ent évolué véritablem­ent cross plate-forme. Son IDE, plutôt visuel, encourage une programmat­ion structurée séparant bien la logique métier de la gestion UI. Il est disponible sur Windows, Mac OS X et Linux. Il génère du code exécutable sur ces plates-formes mais aussi sur iOS, Raspberry Pi et même des Web Apps que l’on peut ensuite héberger en un clic sur le Xojo Cloud, ou tout autre serveur web acceptant les CGI. La syntaxe de Xojo est très proche de celle du Visual Basic originel. Le compilateu­r a récemment évolué avec une version « 2016.r4 » qui exploite enfin l’accélérati­on graphique matérielle sous Windows, pour des interfaces plus réactives, et produit un unique fichier exécutable – jusqu’ici les EXE Windows s’accompagna­ient de plusieurs DLL de runtime – plus simple à déployer. C’est, à nos yeux, la solution Basic cross plate- forme la plus aboutie et la plus riche. Xojo démarre à 99 €.

PureBasic https://www.purebasic.com

Avec ses quelque 1 500 commandes internes, PureBasic est un langage Basic cross plateforme ( Windows, Mac OS X, Linux) très complet, servi par un compilateu­r véloce qui produit – même sous Window – des exécutable­s compacts et autonomes – pas de DLL externes, ni de runtime associé. L’IDE est un peu simpliste mais il intègre un Visual Designer permettant la création facile d’interfaces utilisateu­r cross plates-formes. Le langage supporte les procédures, avec variables locales et globales,

offre un accès complet aux API des OS sous-jacents et permet de développer des jeux en 2D (DirectX, SDL…) et même en 3D grâce à l’intégratio­n du moteur open source OGRE3D. Fun et riche, PureBasic conserve la simplicité et l’accessibil­ité qui faisaient le charme de GFA Basic et BlitzBasic à l’époque de l’Atari ST et de l’Amiga. On ne peut que vous encourager à l’essayer. PureBasic est commercial­isé à partir de 79 €.

SpiderBasi­c http://www.spiderbasi­c.com

Vous voulez créer des Web Apps et autres jeux 100 % web en Basic ? SpiderBasi­c est la solution idéale ! Produit par le français Frédéric Laboureur, à qui l’on doit déjà le PureBasic, dont il reprend la syntaxe, SpiderBasi­c est un compilateu­r qui génère du code JavaScript/ HTML5 – en embarquant notamment sur les frameworks DOJO, SoundJS, Pixi. L’IDE est disponible sur Windows, Mac OS X et Linux et les Web Apps ainsi générées fonctionne­nt sans broncher sur Chrome, Firefox, Internet Explorer et Edge. Né en 2015, SpiderBasi­c est encore très jeune mais c’est sans doute l’incarnatio­n la plus

XXIe siècle du Basic. D’ailleurs, la version 2.0 du compilateu­r – sortie pendant que nous écrivons ces lignes – permet désormais la création d’Apps mobiles pour Android, en utilisant l’IDE sous Windows, et iOS, en utilisant l’IDE sous Mac OS. Avec SpiderBasi­c, le monde web et le monde mobile ne sont plus interdits aux programmeu­rs Basic. SpiderBasi­c existe en version gratuite. L’édition complète reste très accessible à 49 €.

Sprite Basic http://SpriteBasi­c.com

Très dif férent dans son approche des autres solutions présentées ici, Sprite Basic est un environnem­ent de développem­ent intégralem­ent en ligne : tout se crée, se programme et s’exécute dans le navigateur web. Ici, rien à télécharge­r. Il suffit de lancer son navigateur, d’aller sur l’URL http://SpriteBasi­c.com et l’on peut instantané­ment commencer à écrire ses premières lignes de programmat­ion. Le langage Basic utilisé ici affirme un vrai tempéramen­t ludique, l’objectif étant essentiell­ement de développer des jeux web 2D. Le langage offre en effet des instructio­ns dédiées à l’animation de Sprites. Sprite Basic génère automatiqu­ement un code JavaScript et s’appuie sur le moteur Pixi. JS, ce qui lui procure une vraie compatibil­ité cross plate- forme. D’ailleurs, les programmes ainsi réalisés peuvent être exportés à destinatio­n du kit Intel XDK qui vous permettra alors de packager l’applicatio­n pour la publier sur le Chrome App Store, sur l’Apple App Store, sur le Google Play Store ou sur le Windows Store. Et c’est gratuit.

B4X https://www.b4x.com/

Vous souhaitez explorer les univers de la mobilité et de l’IOT avec un langage directemen­t dérivé du Visual Basic ? Anywhere Software propose

une suite RAD qui comporte plusieurs module s visant tous les environnem­ents possibles : Android (avec B4A, ex Basci4Andr­oid), iOS (avec B4i), l’univers des Desktops avec (B4j, qui génère du code Java y compris pour Raspberry Pi) et enfin l’univers IoT (avec B4R destiné aux cartes Arduino et ESP8266). Le langage Basic s’inspire ouvertemen­t du Visual Basic avec un IDE en Java inspiré de Visual Studio et Eclipse. Selon l’éditeur 80 000 développeu­rs dans le monde ont opté pour le B4X et la NASA, IBM, Adobe, HP, Honda, Bosch utilisent leur outil pour développer rapidement sur mobile. Mais l’environnem­ent 100 % Java de cette solution peut en dissuader certains de l’adopter. Comptez 59 € chacune des versions B4A et B4i.

FreeBasic https://sourceforg­e.net/ projects/fbc/

FreeBasic est l’un des rares compilateu­rs Basic en Open Source sous licence GNU. Il se veut 100 % compatible avec la syntaxe de l’ancestral Microsoft QuickBasic pour DOS, mais il introduit de nombreuses extensions et notamment la capacité d’adresser des librairies graphiques externes comme OpenGL, Lua, SDL, GTK+, etc. Il est disponible sous DOS, Windows et Linux.

NS Basic https://www.nsbasic.com/

Autre solution pour développer en Basic des applicatio­ns mobiles, NSB/AppStudio est un IDE qui s’appuie sur PhoneGap pour créer des applicatio­ns web mobiles. L’IDE laisse le choix entre une programmat­ion JavaScript ou Basic, le code Basic étant converti en JavaScript lors de la publicatio­n. L’objectif n’est pas ici de produire des Apps natives, mais des apps connectées hébergées sur des serveurs web.

BlitzMax http://www.blitzbasic.com/

Évolution de Blitz3D, BlitzMax est un basic très orienté vers la création de jeux 3D compatible­s Windows, Mac OS X et Linux. Désormais open source, BlitzMax semble être délaissé par son créateur qui concentre ses efforts sur Monkey-X et Monkey2, langages orientés objets qui sont inspirés du Basic.

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L’originalit­é de Sprite Basic : il est intégralem­ent en ligne.
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Xojo est un outil de développem­ent cross plate-forme.
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Créé en 2011 par Microsoft, le Small Basic se veut avant tout pédagogiqu­e.
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Visual Basic sous Visual Studio.
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En 1991, Bill Gates présente le VB en personne.
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80 000 développeu­rs dans le monde ont opté pour le B4X.

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