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Office 365 est en passe de totalement bouleverser les schémas collaboratifs au sein des entreprises. Sa nouvelle brique, MS Teams, donne davantage de cohérence à l’univers Microsoft, tout en l’ancrant dans les nouveaux usages de communication.
Microsoft Teams : des équipes et des discussions pour mieux collaborer
Le travail collaboratif est un peu une arlésienne qui focalise l’attention des éditeurs de logiciels – et leur marketing – depuis la fin des années 80 et l’introduction de Lotus Notes. Microsoft a toujours été l’un des piliers de cette croisade pour implanter des outils à même de fluidifier la collaboration au sein de l’entreprise, avec comme porte étendard les incontournables Exchange, Sharepoint et Office. Pour autant, la donne a été complètement bouleversée par l’arrivée dans le paysage des réseaux sociaux, de la mobilité et du Cloud. Les réseaux sociaux ont changé la façon de discuter et de diffuser l’information. Parallèlement, les utilisateurs ont cherché à rester en contact avec leurs collègues par le biais de leurs smartphones et ont permis à toute une nouvelle génération de messageries instantanées « mobiles » de s’imposer à commencer par Twitter, WhatsApp, SnapChat, et tant d’autres. Le Cloud a fluidifié et simplifié les transferts et les échanges avec des offres novatrices comme Dropbox, Box ou même WeTransfer. Enfin, Google Docs et sa co- édition en ligne de documents sont venus proposer une approche simplifiée – voire simpliste – de la bureautique et appuyer sur le talon d’Achille de la suite Office depuis ses origines : l’impossibilité d’ouvrir à plusieurs un même document. Il s’ensuivit une profonde transformation des usages et des interactions entre les collaborateurs sur laquelle sont venus surfer des pionniers comme Slack.
Le nouvel ordre collaboratif
Microsoft a évidemment réagi à tous ces mouvements concurrents avec, dans un premier temps, Skype, OneDrive, et les Office Web Apps, qui implémentaient la co- édition sous Word, Excel et PowerPoint mais exclusivement depuis le navigateur web. Cependant, l’arrivée d’Office 365 a véritablement permis à l’éditeur de reprendre la main sur ce marché. Office n’est plus désormais présenté comme une suite bureautique mais comme une suite collaborative. OneNote, Word, PowerPoint, et même Excel depuis juillet dernier, supportent enfin la co- édition des documents, et ce, que les utilisateurs exploitent les versions web, les versions mobiles ou les véritables versions Windows de ces incontournables outils. Mais surtout, Office 365 est une véritable plate- forme extensible et cloud qui ne cesse de s’enrichir et d’en offrir toujours plus : Delve, Forms, Yammer, Power BI, Planner, etc.
Des outils en vogue
Le dernier effort de Microsoft en matière de collaboration a été lancé en mars dernier : Microsoft Teams est un outil de discussion, centré autour de « chats » d’équipes, intégré à l’offre Office 365. Il s’inscrit dans un marché déjà très encombré et dominé par Slack, qui compte 5 millions d’utilisateurs actifs quotidiennement et 1,5 million de comptes payants, mais sur lequel on retrouve également des outils comme Stackfield, Azendoo, Confluence, Co: tunity, Samepage, Sapenta, Pobuca, mais aussi Facebook Workplace, Amazon Chime, Google Hangouts, Jostle, HipChat, Ryver, Talkspirit ou des solutions open source comme Rocket. chat ou Mattermost. Bref MS Teams n’est vraiment pas seul sur ce marché, mais il a pour lui deux atouts clés : il est gratuit pour toutes les entreprises ayant déjà opté pour un abonnement Office 365 et il offre une très forte intégration à la suite Office. Mieux encore, il est à plus d’un titre l’espace de collaboration qui unifie le mieux les outils clés que sont SharePoint, OneDrive for Busines s, Planner, et OneNote. Par exemple, les documents communs à une équipe sont directement accessibles depuis Teams, et la création d’une équipe engendre automatiquement la création d’un notebook OneNote partagé.
Espace collaboratif par excellence
Car Microsoft Teams est pensé pour être cet espace centralisateur où tout coéquipier se rend pour collaborer quelle que soit sa méthode de communication favorite : discussions textuelles, discussions audio ou vidéo, partages de fichiers. L’idée de Teams n’est pas de vous forcer à changer vos habitudes de travail mais plutôt de les retrouver toutes au même endroit. De par son approche centrée sur les équipes, Teams se révèle bien adapté à ce fonctionnement moderne d’entreprise qui veut que l’on assigne de petites équipes à des projets – équipes qui seront dissoutes à la fin du projet, tout comme probablement la discussion associée.
Un espace vraiment universel
Pour satisfaire aux usages actuels, Teams se révèle très universel. Il s’utilise soit d’un navigateur web ( IE, Edge, Chrome, Firefox), sur PC comme sur Mac – mais Safari n’est pas supporté –, soit au travers d’une app dédiée relativement incontournable sous Windows 10 – y compris mobile –, mais aussi sous iOS et Android. Si lors de son lancement, en mars dernier, les applications mobiles étaient encore très limitées, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Elles offrent grosso- modo toutes les fonctionnalités du client Windows à commencer par le support des onglets et la possibilité de voir et même de modifier les documents Office depuis Teams. Microsoft a donc fait l’indispensable effort pour que les utilisateurs nomades ne se sentent pas exclus des conversations et profitent d’une expérience mobile aussi riche que sur PC.
Premier contact
De façon très classique, l’interface du logiciel se présente avec un panneau de gauche listant les différentes équipes et discussions, et un canvas général affichant la discussion sélectionnée. Sur Teams, chaque équipe peut créer de multiples canaux de discussions, assimilables à des sous- équipes pour couvrir une action particulière ou un sous- projet. Chaque membre d’une équipe peut choisir de souscrire ou non à un canal. Si vous voulez simplement tchater avec un collègue en « one on one » , Teams propose un onglet spécial à ces fins via lequel vous pouvez facilement rechercher un collègue dans l’entreprise et démarrer la discussion sans avoir à retourner dans un outil comme Skype for Business. N’importe quel collaborateur de l’entreprise peut se joindre à une conversation d’une équipe définie comme publique, alors que celles définies comme privées sont limitées aux seuls collaborateurs invités.
Des discussions multimédias
Au sein des discussions, les messages peuvent incorporer du texte ou des images mais aussi des émoticônes personnalisables et des « Memes » – autrement dit des Gifs animés – et des Stickers, pour par exemple encapsuler du texte dans une bulle façon BD. De quoi rendre les conversations plus fun et la prise en main du logiciel plus ludique. Mais attention à ne pas abuser de ces artifices visuels peu productifs. Le système de discussion autorise aussi les mentions (@ nom) pour mieux alerter un collaborateur ou le mettre en évidence. Originalité de Teams, le canevas offre des onglets permettant d’ajouter des documents liés à la discussion, des rapports de réunion OneNote ou de simples notes. Ces fonctionnalités exploitent totalement les nouvelles capacités de co- édition simultanée des composantes de la suite Office 2016. Par ailleurs, si vous utilisez déjà intensivement Sharepoint, il n’est nullement nécessaire de copier les documents dans Teams, votre bibliothèque de documents Sharepoint pouvant être intégrée dans l’espace de discussion. On notera au passage que Microsoft a ouvert cette intégration à la concurrence. Si, à l’origine, les documents partagés devaient impérativement
être stockés sous Office 365, ce n’est désormais plus une obligation, Teams supportant également Citrix Sharefile, Google Drive, Dropbox et Box.
Des meetings vidéo intégrés
Un tchat vidéo, plus exactement une réunion vidéo, peut être instantanément initié avec les participants d’un canal ou d’une équipe, mais il est aussi possible de planifier de tels meetings à l’avance. Les meetings ainsi définis sont automatiquement intégrés aux calendriers Outlook ( et on peut ainsi rejoindre un meeting vidéo Teams directement depuis Outlook). Inversement, sachez que Teams peut aussi afficher les détails de vos réunions planifiées sous Outlook. Jusqu’à 80 personnes peuvent participer à ces discussions vidéo ( la technologie s’appuyant sur l’infrastructure de Skype, le service était d’ailleurs au départ connu sous le nom de projet Skype Teams) qui s’affichent directement au sein de Teams et ne passent pas donc pas par un client tierce partie.
Au- delà des discussions
L’une des forces de Teams, c’est que l’on peut directement envoyer des e- mails aux participants, définir un nouveau meeting Outlook ou éditer les documents ( Word, Excel, PowerPoint, OneNote, Power BI…) sans quitter la discussion. L’envoi direct d’e- mail à toute une équipe ou juste aux participants d’un canal est ainsi l’une des bonnes trouvailles de Teams. Quel intérêt ? D’abord l’e- mail est directement intégré au flux de conversations et y restera jusqu’à la dissolution de l’équipe. Cela facilite donc les discussions directes autour du contenu de cet e- mail. Ensuite, si vous avez attaché un fichier à votre e- mail, il est automatiquement téléchargé dans les fichiers associés au canal et tout le monde pourra le coéditer via les fonctions de coédition de Word, Excel, PowerPoint. Enfin, et de façon assez contradictoire, cela tend à limiter le nombre de mails dans la boîte, la plupart des destinataires réagissant dans Teams plutôt que par e- mail.
Planner, un compagnon naturel
Parmi les modules bénéficiant d’une forte intégration avec Teams, on retrouve évidemment les services d’Office 365. À commencer par Planner, l’outil de gestion de tâches, voire de projets de la suite collaborative. Planner est mieux adapté que l’ancestral Microsoft Project dès lors que l’on évoque des projets de petite taille, sans réelles complexités et aisément découpés en tâches élémentaires. Comme Teams fonctionne typiquement pour simplifier la collaboration autour d’un projet, il s’accorde parfaitement avec Planner. L’intégration permet ainsi d’avoir dans les discussions d’équipe un onglet Planner qui permet à chacun de visualiser l’avancement des différentes tâches du projet et vérifier qui travaille sur quoi. Une transparence qui facilite les entraides mutuelles. Au passage, signalons que Teams s’intègre avec d’autres solutions de gestion de projets plus ambitieuses que Planner telles que Trello ou KanBo.
Un service très ouvert
Cette forte intégration ne se limite pas aux seuls modules Office 365 et services Microsoft tels que Power BI, Visual Studio, Stream, Flow ou PowerApps. L’éditeur a pensé Teams comme une plate- forme ouverte sur laquelle peuvent aisément venir se greffer : • des Bots pour des conversations automatisées : aide en ligne, FAQ interactive, recherches en langue naturelle dans les banques de données de l’entreprise, etc., mais aussi d’autres Apps ; • des Connecteurs pour incorporer des informations toujours à jour directement dans les discussions ou recevoir des
notifications d’équipe en fonction des informations émises par des services externes. On en dénombre aujourd’hui plus d’une centaine qui vont des flux RSS aux activités Visual Studio Team Services ou aux bugs relevés dans Jira, des tickets ZenDesk aux objectifs BeeMinder, etc. ; • des Apps qui s’affichent sous forme d’onglets au sein du canevas de discussions et qui renforcement l’intégration de Teams avec des services comme ZenDesk, HootSuite, Asana, Growbot , Trel lo, SmartSheet, Wrike, et autres. Typiquement cette intégration permet de consulter une liste Trello, d’afficher les tickets de support ZenDesk, de gérer des projets Wrike ou de visionner des vidéos YouTube sans quitter la conversation, ni avoir à lancer une page web ou une autre app. Les entreprises peuvent, elles aussi, venir intégrer leurs propres applications métier. Elles pourront soit passer par le SDK, soit bien plus simplement directement incorporer leurs propres « Power Apps » mobiles dans un onglet Teams. De même, l’intégration de vos tableaux de bord Power BI se fait en deux clics.
Un service administrable
Mais l’autre élément différenciant de Teams, concerne les possibilités de contrôle avancé par l’IT du service. C’est un point sur lequel Microsoft se démarque de la plupart de ses concurrents. Outre l’intégration native à Azure Active Directory, Teams adhère à de multiples standards et régulations en matière de sécurité et compliance : European Union Model Clauses, ISO27001, HIPAA, SOC1, SOC2, etc. Ainsi, l’archivage des conversations pour des contraintes légales est directement intégré au produit avec des fonctions de recherche dans les Logs d’audit. De même, les administrateurs ont un contrôle total sur les bots, connecteurs et Apps que les utilisateurs peuvent incorporer à leurs espaces de discussions afin d’éviter les dérives du Shadow IT.
Un frein en moins à son adoption
Jusqu’ici, l’adoption de Teams a été freinée par un gros défaut originel : l’impossibilité d’insérer dans une équipe de personnes externes à l’entreprise ( fournisseurs, partenaires…). Ce manque, souvent jugé rédhibitoire, vient de s’évanouir avec la dernière mise à jour du service. Désormais, vos clients, partenaires et fournisseurs, peuvent être invités dans les équipes Teams. À une condition cependant : qu’ils disposent d’un compte Azure Director y – ce qui est forcément le cas de tous vos partenaires abonnés à Office 365 – ou d’un Compte Microsoft, cas des utilisateurs Windows 10, Skype, Hotmail, etc. Dans le cas contraire, ils seront redirigés vers la création d’un tel compte au moment où ils cliqueront sur
le lien d’invitation à rejoindre l’équipe. Avec l’arrivée de cette fonctionnalité « Guest Acces s » , Teams comble son principal retard sur son concurrent Slack. Les membres invités peuvent dès lors participer aux discussions, rejoindre les réunions et collaborer aux documents partagés. Techniquement, ce « Guest Access » est implémenté via le service Azure AD B2B Collaboration ce qui donne aux DSI l’assurance que ces comptes invités ne bénéficieront que d’un accès condit ionnel et sécur isé, une implémentation qui offre également aux administrateurs des fonctionnalités à base de machine learning pour détecter les comportements déviants et suspicieux. À tout moment, les droits d’accès d’un invité pourront bien sûr être révoqués par les admins Office 365.
Des améliorations attendues
Reste que tout n’est pas pour autant parfait dans l’univers Teams. L’une des absences les plus notables face à son concurrent Slack demeure l’impossibilité de créer des canaux privés. Cer tes, Teams permet de créer des « Private Teams » de sorte que les discussions de l’équipe restent confidentielles à l’équipe et que personne d’autre ne puisse les trouver par la recherche ou s’y abonner. En revanche, il n’existe aucune solution pour définir un canal de discussion privé parmi les canaux de discussions d’une équipe. Microsoft a récemment annoncé qu’une telle fonctionnalité était en développement mais n’a pas précisé de date de disponibilité. D’autres améliorations, là encore sans date, sont aussi prévues comme la possibilité d’utiliser plusieurs comptes Teams simultanément ou de lancer un partage d’écran sans déclencher d’abord un appel vidéo. On regrettera également la lenteur au lancement du client Windows 10 qui vous donne clairement envie de ne jamais quitter le logiciel. Mieux vaut ne pas être pressé, un comble pour un outil de discussions. Heureusement, la clôture de la fenêt re entraîne l’icônification de l’application plutôt que sa fermeture, ce qui limite le problème.
Un effet Jungle à appréhender
Enfin, l’introduction de Teams complexifie mécaniquement le paysage des outils de mise en relation des collaborateurs : entre Teams, Yammer, Sharepoint, Skype for Business, Outlook, il existe des zones de recouvrement et des redondances qui pourront plonger DSI comme utilisateurs dans une certaine perplexité. On peut se demander si Microsoft conservera encore des fonctionnalités comme les groupes Yammer ou les groupes Outlook. Il n’est pas facile de s’y retrouver d’autant que Microsoft n’a pas prévu de mécanismes de migration entre ces zones de recouvrement. Nul doute que Microsoft va devoir remettre un peu d’ordre dans toutes les fonctionnalités sociales de ses produits afin de supprimer les redondances et mieux focaliser les attentions sur les complémentarités des services. En effet, pour des discussions sur le long terme ou la diffusion d’informations au sein de toute l’entreprise, Yammer – le réseau social d’entreprise d’Office 365 – se révèle plus adapté que Teams. De même, pour récapituler tous les éléments de l’équipe à la clôture du projet, on utilisera volontiers Sharepoint plutôt que de conserver indéfiniment les discussions des équipes. Au final, il faut bien reconnaître que la forte intégration de Teams à l’univers collaboratif Office 365 a beaucoup de sens et que cette nouvelle brique a ses atouts pour séduire les entreprises. Le service est universel, ouvert et bien ancré dans les nouveaux usages. Le principal risque est finalement d’en tenter une adoption sauvage sans une réflexion préalable sur le fonctionnement de l’entreprise, la stratégie de gouvernance et la capacité d’adoption d’un tel produit par les utilisateurs. ❍