Notre histoire est un jardin
Thomas B. REVERDY et Sylvain VENAYRE Un voyage mémoriel d’une actualité brûlante.
Il voulait écrire un grand roman d’aventure et il a fini par ratisser un sentier ignoré de notre histoire. Auteur sexagénaire, le narrateur du Jardin des colonies avançait à tâtons dans sa quête d’un héros « sans remords ni scrupules, mais sans être un salaud non plus, […] un anonyme, un sans-grade », quand au gré de ses lectures il tombe sur un cas d’espèce : Jean Thadée Dybowski (1856-1928), créateur d’un jardin tropical à la lisière de la capitale, où il organisa l’exposition coloniale de 1907. De documents en archives, notre homme (double de Thomas B. Reverdy) rencontre un historien (comme le susdit Reverdy, donc, qui s’est ici associé à Sylvain Venayre) au Musée national de l’histoire de l’immigration, originellement nommé musée des Colonies, érigé en 1931 à deux pas de l’ancien jardin. C’est la déambulation des deux hommes que nous lisons ici, parcourant avec eux les vestiges d’un musée et d’un parc alors très étendus, notamment cette sidérante « mosquée fantôme » qui fut en fait le premier minaret sur le territoire français. Biographie de Dybowski devenant la redécouverte d’un monde enfoui (comme le sont somme toute les romans d’aventure du XIXe siècle), Jardins des colonies est une subtile réflexion sur la narration d’un récit historique véritablement postcolonial, à l’opposé d’un « récit national » favorisant un patriotisme trop blanc de peau. Ecrit durant la vague d’attentats de 20152016 vers lesquels il fait régulièrement des détours, ce livre aussi pédagogique que singulier porte haut l’idée de la culture, et d’une littérature comme arme mémorielle.
Hubert Artus