Coeur Croisette
Septuagénaire, le Festival de Cannes reste un moment essentiel de l’année ciné
Certains septuagénaires ont des airs d’amants à jolies starlettes. Il en va ainsi du vénérable Festival de Cannes, qui fête cette année sa soixante-dixième édition. En attendant de découvrir les films sélectionnés et de connaître le palmarès du jury présidé par Pedro Almodovar, on peut déjà se replonger dans l’histoire de ce moment rituel et essentiel de l’année cinématographique. En janvier dernier, on avait pu lire Sélection officielle de Thierry Frémaux (Grasset), journal de six cents pages tenu par le délégué artistique du Festival entre mai 2015 et mai 2016. On y découvre la « fabrication » de la manifestation, le rythme stakhanoviste des projections, quelques éléments de coulisses (les SMS envoyés aux équipes des films primés, par exemple) et coups de coeur – de griffe, aussi… Outre ce must, Frémaux a trouvé le temps de diriger l’ouvrage collectif Ces années-là (Stock), recueil de soixantedix chroniques (signées pour l’essentiel par des critiques) présentant chacun des crus – suivi d’un abécédaire, d’une chro- nologie et d’un index. Cette synthèse idéale pourra être complétée par le beau livre Festival de Cannes de Philippe Dupuy et Jean-François Roubaud (Gilletta), qui compile pas moins de cent cinquante clichés de la collection Huffschmitt/Sipa et du quotidien Nice Matin. Si les indiscrétions ne manquent pas dans Voir Cannes & survivre de Carlos Gomez (L’Artilleur), on en trouve aussi dans différents titres évoquant moins directement la Croisette. Parmi les articles de Secrets de cinéma (Plon), Bruno Cras s’attarde notamment sur le refus d’Isabelle Adjani de participer à la conférence de presse de L’Eté meurtrier ayant provoqué l’ire des photographes qui déposèrent leurs appareils à leurs pieds lors de la montée des marches de l’actrice! Brèves Rencontres de Michèle Halberstadt (Albin Michel) donne l’occasion à la productrice (ex-journaliste) de se souvenir, entre autres, de son premier festival, en 1985, et de l’entartage de Jean-Luc Godard par Noël Godin. Evocation de la production cinématographique française entre 1969 et 2014, Histoire secrète du cinéma français (Robert Laffont) permet à Michel Pascal de retracer l’évolution du septième art national, qui a connu quelques gros accidents industriels – la tristement célèbre projection cannoise de La Lune dans le caniveau de Jean-Jacques Beineix ayant démoli la carrière du long-métrage… Au-delà de ces nombreux documents, n’oublions pas les jeunes cinéphiles qui pourront s’amuser avec le tome IV du Bloc-notes de Louise, signé Marion Michau et Charlotte Marin (Albin Michel jeunesse), dont les jeunes héroïnes vont traîner du côté de l’hôtel Martinez, rêvant de croiser les stars et de fricoter dans les soirées au lieu de réviser leur bac de français. Si seulement ces adolescentes avaient au moins choisi l’option cinéma-audiovisuel… Baptiste Liger